mardi 7 juin 2005

QUI CONDUIRA LE QUÉBEC À SON INDÉPENDANCE ?


Jusqu’à samedi passé, je pensais que Bernard Landry serait ce leader. Sa maturité humaine et politique en faisait le candidat tout désigné. Sa passion pour un Québec indépendant et ses compétences pour en débattre avec les adversaires les plus coriaces le désignaient comme le porte étendard derrière lequel le peuple du Québec pouvait s’aligner. L’appui dont il se réclamait pour mener à terme ce mandat devait répondre à 80 % des votes des membres présents au Congrès. Avec 76.2% des votes, il demeura en déficit de 4.8% des votes et il en tira les conclusions qu’il s’était lui-même imposées. (voir un article sur Bernard Landry en février dernier.) http://humanisme.blogspot.com/2005_02_16_humanisme_archive.html

Je ne vois pas pour l’instant, parmi les candidatures annoncées ou suggérées, celle qui permettrait de répondre à autant d’attente. D’abord, je pense que M. Duceppe doit poursuivre son travail à la tête du Bloc Québécois. Le plus grand cadeau à faire au Parti libéral du Canada et même au Parti de M. Harper serait de laisser son poste et de passer au Parti Québécois. Qu’il reste à Ottawa. C’est encore là qu’il peut le mieux servir les intérêts de l’indépendance du Québec. C’est également là que sa popularité résistera le plus longtemps aux intempéries.

Madame Marois mérite, pour sa part, de se frotter au défi d’une véritable course au leadership. Elle constatera par elle-même qu’elle est, peut-être plus qu’elle ne le pense, déconnectée du peuple québécois. Le chemin parcouru lui a fait franchir non seulement les échelles du pouvoir politique mais également celles du pouvoir économique. Il n’est pas évident que les attitudes et comportements qu’elle en a hérités en aient fait une personne plus attentive aux attentes des québécois et des québécoises. Le seul thème de la « femme » ne saura résister longtemps à tous les autres thèmes qui retiennent les préoccupations des Québécois et des Québécoises.

Monsieur Legault, tout en ne le connaissant que très peu, a avec lui la sincérité et la passion d’un Québec indépendant, sans toutefois ce charisme qui allume la flamme. Quant à Monsieur Boisclair, ses qualités de bon gestionnaire ne lui donne pas plus qu’à monsieur Legault le charisme qui allume cette flamme qui porte les peuples dans les derniers efforts d’un chemin ardu.

Pour moi, la personne qui pourrait reprendre le flambeau et le porter avec compétence et passion demeure Claude Charron. Son sens politique, ses compétences administratives, sa symbiose avec le peuple québécois et son charisme qui ne trompe personne en font un candidat qui, à le vouloir lui-même, créerait un nouveau sommet dans cette marche dont le terme est à portée de main. De tous les candidats en liste, il demeure celui qui rallierait le plus grand nombre de québécois et de québécoises.

Mes meilleurs souhaits pour Bernard Landry, un homme dont nous pouvons être fiers. Quant à M. Charron, puisse l’élan de sa jeunesse, enrichi d’un vécu d’ouverture et de communication, répondre à l’appel d’un peuple en marche vers son indépendance.

Oscar Fortin

jeudi 2 juin 2005

SACERDOCE ET DÉMOCRATIE DANS L'ÉGLISE

Ce n’est pas d’aujourd’hui que l’on discute du mariage des prêtres, de l’ordination des femmes et d’une plus grande démocratisation de l’exercice du pouvoir dans l’Église. Toutefois, ces sujets, plus ou moins suspects il n’y a pas encore si longtemps, sont maintenant abordés et débattus au grand jour. De plus en plus de croyants et croyantes prennent la parole et se reconnaissent le droit de participer au développement de la mission de l’Église dans le monde. Le sacerdoce royal dont ils sont investis en fait des témoins actifs de la foi et leur confère des responsabilités dans l’organisation de l’Église terrestre. Ils ont cette conscience que l’Esprit Saint n’est pas réservé à une élite, mais est présent et agissant en chaque croyant.

VATICAN II ET L'ÉGLISE

L'Esprit habite dans l'Eglise et dans les coeurs des fidèles comme en un temple (cf. I Cor. 3, 16; 6, 19); en eux il prie et rend témoignage de leur adoption filiale (cf. Gal. 4, 6; Rom. 8, 15-16 et 26). Cette Eglise qu'il amène à la vérité tout entière (cf. Jn 16, 13), qu'il réunit dans la communion et le ministère, il l'édifie encore et la dirige par des dons variés, tant hiérarchiques que charismatiques, et par ses oeuvres il l'embellit (cf. Eph. 4, 11-12; I Cor. 12, 4; Gal. 5, 22). Il la rajeunit par la force de l'Evangile, il la rénove perpétuellement et la conduit enfin à l'union parfaite avec son Epoux (3). Car l'Esprit et l'Epouse disent au Seigneur Jésus "Viens!" (cf. Apoc. 22, 17). Ainsi l'Eglise universelle apparaît-elle comme "un peuple rassemblé dans l'unité du Père, du Fils et de l'Esprit Saint" (4). Vatican II (Lumen gentium 1,4)

De ce corps le Christ est le chef. Il est lui-même l'image du Dieu invisible, et en lui tout a été créé. Lui-même est avant toute chose et toutes choses subsistent en lui. Il est le chef du corps qu'est l'Eglise. Il est le principe, le premier-né d'entre les morts, afin d'avoir en tout la prééminence (cf. Col. 1, 15418). Par la grandeur de sa puissance il règne sur les choses du ciel et de la terre; grâce à sa perfection et à son action qui surpassent tout, il comble des richesses de sa gloire son corps tout entier (7) (cf. Eph. 1, 18-23).(Lumen Gentium, introduction ,1,7)

Ainsi, tous les croyants, du pape jusqu’au dernier des fidèles, sont appelés à être à l’écoute de l’Esprit Saint qui se révèle et se manifeste par la diversité des dons. Cette écoute doit favoriser le discernement qui sera d’autant plus fondé qu’il se réalisera en en communion avec la foi de la communauté. Paul, dans sa première lettre aux Corinthiens (ch. 14, v.29-32), parlant de ceux et celles qui ont le don de prophétie, les invite à « prendre la parole et que les autres jugent. » et un peu plus loin dans le même texte, il ajoute que « le prophète est maître de l’esprit prophétique qui l’anime. » En d’autres termes, il n’a pas à demander la permission pour dire ce que, en son âme et conscience, il croit devoir dire. Il appartiendra toutefois à la communauté de juger et d’apprécier. C’est, me semble-t-il, dans cet esprit que les échanges sur le sacerdoce et la démocratie dans l’Église doivent se faire.

UNE PROBLÉMATIQUE À REPENSER

La question de l’ouverture du sacerdoce ministériel aux femmes et aux hommes mariés ou encore sa restriction à certaines tâches spécifiques ne peut se discuter qu’en revoyant l’ensemble des fonctions et des services que commandent la mission de l’Église et son organisation sociale, politique et économique. Il ne faudrait pas que ces discussions se fassent uniquement aux seules fins de répondre à la diminution du clergé et à son vieillissement. Je pense qu’il faut revoir l’ensemble des services nécessaires au bon fonctionnement de la communauté chrétienne et à l’Institution ecclésiale comme telle. Il y a la réactualisation de la vie sacramentelle et la manière d’en assurer les services. Il y a la réorganisation de l’institution comme gouvernement central et diocésain et la manière d’en assurer les diverses fonctions. Il y a la révision de la vie de foi et la manière d’en assurer le témoignage au service de la communauté humaine dans ses valeurs de justice, de vérité et de paix.

LA RÉACTUALISATION DE LA VIE SACRAMENTELLE

Il est certain qu’il y a un effort à faire pour rapprocher du quotidien de la vie la symbolique de la vie sacramentelle. Chacun des sacrements peut être repris et repensé en cette optique.

Par exemple, le baptême, est célébré normalement par une fête familiale qui réunit les plus proches de la famille. Déjà, tout baptisé, de par son sacerdoce royal, est apte à transmettre le sacrement de baptême dans des conditions, pour le moment, exceptionnelles. Un nouvel encadrement de ce sacrement permettrait aux familles ou aux communautés locales de procéder elles-mêmes à son application.

Nous savons que pour le sacrement de mariage, les ministres habilités à son actualisation sont les conjoints eux-mêmes. Encore là, avec un nouvel encadrement, ce sacrement pourrait se vivre autrement qu’il ne l’est actuellement sans qu’il y ait nécessité de la présence du prêtre. Tout baptisé, homme ou femme, pourrait présider une telle célébration.

Une telle révision devrait se faire pour tous les actes du culte, permettant ainsi de discerner tous ceux dont la responsabilité pourrait être remis à l’exercice du sacerdoce royal dont les baptisés sont investis. Cet exercice nous conduira inévitablement à un début de réponse au problème des vocations.

LA RÉORGANISATION DE L’INSTITUTION

Le Vatican est un État et les Diocèses une organisation bien structurée. Il y a sûrement matière à révision des rôles et fonctions que jouent le Vatican comme gouvernement et les diocèses comme organisations religieuses dans le monde et les sociétés civiles. Un débat qui déborde de beaucoup l’objet de la présente réflexion et qui devra être repris à un moment ou l’autre.

Mon propos est plutôt de faire ressortir que la grande majorité des fonctions, qui sont celles de tout gouvernement, ne comportent pas, de par leur nature, qu’elles soient assumées par des personnes investies du sacerdoce ministériel. En dehors de la personne du pape dont le rôle principal est celui de Pasteur de l’Église universelle, je ne vois pas de fonctions qui ne puissent être assumées par des baptisés, hommes ou femmes. Les compétences recherchées sont d’un autre ordre : docteur en théologie, diplomate, spécialiste en droit canon, administrateur, banquier etc. Toute personne, disposant des compétences pertinentes, devrait normalement être éligible à ces fonctions. Pour le moment ce sont des évêques et des cardinaux, tous prêtres, qui dirigent ces divers services. Rien ne devrait s’opposer au fait que des hommes et des femmes occupent des fonctions de représentation diplomatique ou dirigent des Secrétaries d’État.

Dans les premières communautés chrétiennes, le Diaconat répondait d’abord et avant tout aux responsabilités de l’organisation matérielle des communautés. C’est lui qui gérait sous la responsabilité immédiate de l’Évêque le volet organisationnel et matériel des communautés. Aujourd’hui, le diacre est plutôt celui qui remplace le prêtre dans certaines fonctions de culte… Il est le produit de la diminution du nombre de prêtres.

Il est certain que l’ouverture des fonctions administratives aux hommes et aux femmes donnerait du Vatican et des Diocèses une image toute autre. Cette approche permettrait également de libérer tous ces prêtres, actuellement absorbés dans ces tâches matérielles et politiques. Ces derniers pourraient s’adonner entièrement aux tâches de leur mission sacerdotale.

UNE RÉVISION DE LA VIE DE FOI

La crise que bien des croyants et croyantes vivent aujourd’hui vient du fait que le siècle que nous vivons nous oblige à passer d’une foi individualiste à une foi ouverte sur le monde. Ce vécu qu’est le nôtre ne nous permet plus de vivre l’âme tranquille dans la coquille d’une pratique religieuse sans lien avec ce qui se passe dans le monde. Notre lecture des Évangiles devient une nouvelle révélation et notre rencontre de Jésus de Nazareth se fait en symbiose avec celle des laissés pour compte et des déshérités de la terre.

Cette foi qui se ressource et se renouvelle à la fois dans la prière et la solidarité devient de plus en plus un ferment d’une Église libérée et engagée au service des humbles de la terre. De nouvelles formes de solidarités apparaissent et un nouvel œcuménisme réunit toutes les personnes de bonne volonté dans la lutte pour l’avènement d’un homme nouveau, d’une humanité sainte.

CONCLUSION

Le Christ ressuscité et l’Esprit Saint sont à l’œuvre dans l’Église et dans le monde. En tant que croyants nous sommes témoins de cette présence agissante. Celui qui peut de ces pierres faire des fils à Abraham ou des morceaux de pains pour les affamés, peut également faire de chacun de nous, hommes ou femmes, des témoins du Royaume du Père. Beaucoup de questions sur le sacerdoce des femmes, le mariage des prêtres et la démocratisation de l’Église ne se poseraient plus ou se poseraient tout autrement advenant ce renouveau dans l’approche de la pratique religieuse et de la gestion de l’Organisation de l’Église.

Oscar Fortin