vendredi 7 décembre 2018

LA FOI SANS LA RELIGION EST POSSIBLE



MAIS SANS LES OEUVRES ELLE NE L'EST PAS

La très grande majorité des croyants et croyantes considèrent que la foi et la religion sont inséparables.  Pour ces derniers, la partie la plus visible de la foi se révèle à travers les cultes religieux et les pratiques sacramentelles. Dans ce contexte, croire, se ramène le plus souvent à participer à ces cultes.  C’est le cas de toutes les Églises connues. Chacune d’elles a ses « us et coutumes», dont un credoqui en exprime les croyances. Parler, dans ce contexte, d’une foi sans religion, serait comme parler d’un « esprit humain» sans « corps humain ».  L’un et l’autre vont ensemble.

Pourtant, les cultes développés tout au long des siècles ont souvent pris une tangente qui, loin de remettre en lumière la foi, y en éloigne. Ce fut le cas, entre autres, dans la tradition hébraïque. Que de fois, Yahvé, par ses prophètes, a dénoncé ces cultesqui étaient devenus des signes de contradiction de la foi transmise à  Abraham, Isaac et Jacob !  

« cessez d'apporter de vaines offrandes : J'ai en horreur l'encens, les nouvelles lunes, les sabbats et les assemblées; je ne puis voir le crime s'associer aux solennités. Mon âme hait vos nouvelles lunes et vos fêtes; elles me sont à charge; je suis las de les supporter. Quand vous étendez vos mains, je détourne de vous mes yeux; quand vous multipliez les prières, je n'écoute pas: vos mains sont pleines de sang» Isaïe 1,13-15

« purifiez-vous, ôtez de devant mes yeux la méchanceté de vos actions; cessez de faire le mal.  Apprenez à faire le bien, recherchez la justice, protégez l'opprimé; faites droit à l'orphelin, défendez la veuve. » Isaïe 1,16

L’apôtre Jacques, dans sa lettre aux croyants et non croyants de son époque, écrivait ceci : « Si quelqu'un croit être religieux, sans tenir sa langue en bride, mais en trompant son coeur, la religion de cet homme est vaine. La religion pure et sans tache, devant Dieu notre Père, consiste à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions, et à se préserver des souillures du monde. »

«  Mes frères, que sert-il à quelqu'un de dire qu'il a la foi, s'il n'a pas les oeuvres ? La foi peut-elle le sauver ?  Si un frère ou une soeur sont nus et manquent de la nourriture de chaque jour, et que l'un d'entre vous leur dise : allez en paix, chauffez-vous et vous rassasiez ! et que vous ne leur donniez pas ce qui est nécessaire au corps, à quoi cela sert-il ? Il en est ainsi de la foi : si elle n'a pas les oeuvres, elle est morte en elle-même.(Jc. 2, 14-17)

 Mais quelqu'un dira : toi, tu as la foi; et moi, j'ai les oeuvres. Montre-moi ta foi sans les oeuvres, et moi, je te montrerai la foi par mes oeuvres.  Tu crois qu'il y a un seul Dieu, tu fais bien; les démons le croient aussi, et ils tremblent. Jc. 2,18-19


Dans l’esprit de ces textes, force est de constater que la foi sans la religion retrouve tout son sens dans les œuvres d’Humanité qui en deviennent le culte parfait. Croire en l’Humanité, sous cet angle, revient au même que de croire en Dieu. Il est intéressant de noter, dans le récit du jugement dernierque nous livrent les Évangiles, que plusieurs des interpelés pour entrer dans la Maison du Père avaient agi par solidarité avec les personnes humaines dans le besoin,  sans savoir ou croire en Jésus.

« Les justes lui répondront : Seigneur, quand t'avons-nous vu avoir faim, et t'avons-nous donné à manger; ou avoir soif, et t'avons-nous donné à boire ? Quand t'avons-nous vu étranger, et t'avons-nous recueilli; ou nu, et t'avons-nous vêtu ? Quand t'avons-nous vu malade, ou en prison, et sommes-nous allés vers toi ? Et le roi leur répondra : Je vous le dis en vérité, toutes les fois que vous avez fait ces choses à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous les avez faites. » Mt.26, 38-41

Leur foi porte sur les personnes humaines, sur celles qui sont les plus vulnérables, les moins bien outillées pour se faire respecter dans leurs droits les plus essentiels et se faire reconnaître comme membres à part entière de la communauté humaine. Athées, agnostiques, incroyantsqui se font prochesde cette humanité blessée dans sa dignité, dans ses besoins essentiels, dans ses espoirs pour une vie meilleure, auront cette surprise d’être accueillis à la maison du père pour s’être fait proches et à l’écoute de cette Humanité blessée. Il en ira de même, également, pour tout croyant qui aura, par ses œuvres, révélé son authentique foi.

QUE CONCLURE?

Les cultes religieux qui s’expriment à travers les liturgies, les sacrements, les pèlerinages et diverses autres dévotions ne peuvent se substituer aux œuvres qui rejoignent cette Humanité blessée. Dans le récit du jugement dernier, on retrouve également un certain nombre de ces croyants qui n’ont pas su reconnaître cette Humanité blessée

 « Car j'ai eu faim, et vous ne m'avez pas donné à manger; j'ai eu soif, et vous ne m'avez pas donné à boire; 43 j'étais étranger, et vous ne m'avez pas recueilli; j'étais nu, et vous ne m'avez pas vêtu; j'étais malade et en prison, et vous ne m'avez pas visité. 44 Ils répondront aussi : Seigneur, quand t'avons-nous vu ayant faim, ou ayant soif, ou étranger, ou nu, ou malade, ou en prison, et ne t'avons-nous pas assisté ? 45 Et il leur répondra : Je vous le dis en vérité, toutes les fois que vous n'avez pas fait ces choses à l'un de ces plus petits, c'est à moi que vous ne les avez pas faites. Mt. 26,42-45

Ce n’est pas par la magie des cultes et des sacrementsque les portes de la Maison du Père vont s’ouvrir pour nous y accueillir, sinon par les œuvres qui nous font proches des délaissés de la terre.Ils sont là, dans tous les milieux, nous interpellant de mille et une manières. À l’image du bon samaritain, il faut prendre le temps de  nous arrêter et d’agir au meilleur de ce que nous sommes.

Noëlrappelle la naissance d’un enfant dont le destin sera de rappeler à l’Humanité ces vérités fondamentales de fraternité et de solidarité humaine, transformant la haine en amour, les ambitions de pouvoir et de domination en services humbles et discrets auprès des plus fragiles et délaissés de notre monde. À ce niveau, il y a de la place pour tout le monde. L’Humanité est de nous tous. L’enfant que célèbre Noël est celui-là même dont l’histoire et les enseignements nous ouvrent les yeux sur cette Humanité.

Joyeux Noël à tous les croyants et croyantes en cette Humanité.


Oscar Fortin