jeudi 3 juin 2010

ÉLECTIONS EN COLOMBIE OU COMMENT GARDER LE POUVOIR

Le 30 mai dernier il y a eu les primaires et le 20 juin prochain ce sera la grande finale entre le candidat Santos et Mockus. Il est certain qu’à lire uniquement ce que nos médias nous transmettent de ces élections en Colombie nous n’y trouverons que ce qu’il y a de plus normal et de plus démocratique. Il n’y aura vraiment rien de spécial pour attirer notre attention ou pour éveiller nos soupçons sur ce qui sera considéré, un jour, comme une des mises en scène les mieux réussies et des plus frauduleuses.

Au lendemain du premier tour de scrutin, une fois connus les résultats, la sénatrice Piedad Cordoba, celle qui s’est fait connaître, entre autres, pour sa participation à la libération de prisonniers détenus par les Forces armées révolutionnaires colombiennes (FARC), a eu ce commentaire : « la croissance progressive de la popularité de Mockus, avant les primaires, a été « fictive et médiatique ». En somme, pour elle, une mise en scène électorale, donnant toute l’apparence de la démocratie, mais où le contrôle demeure entier sur chacun des acteurs.

Pour dire vrai, je n’ai vraiment compris le sens de ces propos que lorsque j’ai pris connaissance de cet autre article, cette fois d’un auteur que je ne connaissais pas, Archibald Emorej. Il nous fait entrer dans le monde de la politique souterraine qui a bien en main le pouvoir et la destinée du pays. Dans cet article, « Nouvel acte de la dictature démocratique Colombienne : les élections présidentielles. (et quelques éléments sur l’axe Bogotá -Tel Aviv), il nous brosse, entre autres, un portrait des principaux candidats qui sont loin de l’image que l’on veut bien nous en transmettre. La lecture de cet article mérite le détour et permet de mieux comprendre les nouvelles formes d’intervention qui isolent les véritables oppositions pour leur substituer « des marionnettes » sur lesquelles ils garderont toujours plein pouvoir.

Pour vous donner le goût d’aller à la source, je me permets quelques extraits de cet article plus qu’intéressant sur les principaux candidats à la Présidence et à la Vice-présidence.

Juan Manuel Santos, premier candidat à la Présidence :

« En tant que ministre de la défense du gouvernement Uribe (juillet 2006-mai 2009) Santos a en effet mis en place une politique de prime pour chaque tête de guérillero... de l’argent et des jours de permissions contre du sang. Légalisant et payant cette vieille coutume qui consiste à déguiser tout ce qui bouge en partisan de l’insurrection, on ne peut pas parler de cas isolés lorsque la « justice » colombienne enquête sur 1273 cas impliquant des membres de l’armée concernant 2 077 assassinats, dont 122 femmes et 59 mineurs. 481 officiers, dont 14 colonels, sont dans le collimateur de la « justice ».

Antanas Mockus, second candidat à la Présidence :

« Ce ne sont pas tant les sondages qui se sont plantés en le mettant au coude à coude avec Juan Manuel Santos, mais c’est surtout lui qui a auto-sabordé sa candidature. Pas n’importe qui, donc, mais n’importe quoi, le roi des prestidigitateurs, un clown sans la moindre profondeur politique, et l’auguste cheval de Troyes de bien sinistres personnages. Reconnaissons-lui le fait d’être anticommuniste, profondément libéral et fumeur de marijuana fameux. C’est un peu juste pour être président de la vieille Colombie mais à peine. Il lui manque le contact avec le vrai peuple colombien, celui des campagnes et des montagnes, celui qui ne vit pas à Bogotá dans les quartiers chics. Autrement dit, c’est un parfait inconnu au-delà du Nord la capitale. A peine docteur en philosophie de l’Université Nationale en 1988, il en est nommé vice-recteur par un tour de passe-passe qui écarte ceux qui avaient droit au poste par le mérite de leur travail. C’est que ses amis lui assignent la tâche de privatiser l’éducation supérieure et il le fera fièrement, argumentant que pour une bonne éducation il faut payer. Claro ! Si bien que ses amis lui offrent la mairie de Bogotá, campagne de presse énormissime, enfin un intellectuel intègre... et c’est parti pour la grande privatisation de la capitale, de ses services de transport, de la santé et de l’énergie. Militarisation de la ville, nettoyage sociale et le projet absurde de faire de Bogotá la capitale sud-américaine du commerce, des affaires, de je ne sais quelles conneries quand les immenses quartiers bidonvilles qui ceinturent la ville s’enfoncent chaque jour dans la misère et dans sa terrible conséquence, la violence, pauvre jeunesse chair à canon du capitalisme. Finalement, pour ceux qui piaillent un peu la langue de Gabriel Garcia Marquez, voici un article complet (2) sur les relations de Mockus et de la famille Rotschild (rien que ça camarade... Ah ! L’écologie capitaliste, on y arrive à peine. »

Angelino Garzón, candidat de Santos à la Vice-présidence

« Le personnage a fait toute sa carrière dans les années 80 comme secrétaire général d’un des plus grands syndicat, la CUT. Un communiste monsieur, un vrai, un dur, à tel point qu’il fut vice-président de la Union Patriotica, ce parti politique exterminé par les élites colombiennes. Eh bien ce personnage est passé à l’ennemi, un parcours à tel point suspect que l’on se demande s’il n’a pas participé à l’élimination de ses anciens camarades en donnant quelques noms. Lui qui a accompagné Uribe en 2007 à Washington pour préparer les accords ultralibéraux du TLC (tratado de libre commercio) alors que les assassinats des membres de l’UP et de leurs familles se poursuivent encore aujourd’hui... voilà la formule qui a raflé toutes les voix dimanche dernier, Santos-Garzón, l’assassin et le traitre. »

Sergio Fajardo Valderrama, candidat de Mockus à la Vice-présidence

« Ancien maire de Medellin... il est impliqué jusqu’au cou dans la mafia du cartel. C’est-à-dire qu’il a acheté la paix sociale avec le grand parrain (et paramilitaire) local, Don Berna, donnant l’illusion d’une politique efficace... simplement une fois Don Berna extradé aux États-Unis (jusqu’alors il dirigeait son empire depuis une prison colombienne), une fois l’accord à l’eau, celui-ci s’est épanché sur la corruption sans bornes, les fraudes électorales, le maquillage des statistiques, l’augmentation du trafic de stupéfiants et les liens avec les paramilitaires du saint Fajardo... un clown et un truand as de la politique à la Pablo Escobar, voilà l’autre choix démocratique pour le second tour. »

Je pense que cet article vient s’ajouter à celui de notre ami Serge Charbonneau qui nous a déjà mis sur la piste de ces dessous plutôt mal connus. Il apporte toutefois un point de vue quelque peu différent sur les candidats Mockus et Fajardo. De quoi enrichir le débat et la recherche. Le 20 juin prochain je vous prédis l’élection de Juan Manuel Santos à la Présidence. Je n’en ai aucun mérite, les dés sont pipés et la « démocratie » devra attendre un autre rendez-vous.

Oscar Fortin

Québec, le 3 juin 2010

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