lundi 13 mars 2006

LA COOPÉRATION AVEC LES ARMES


Je ne pense pas qu’aucun canadien soit contre la coopération humanitaire internationale. Nos valeurs et nos solidarités traditionnelles avec les plus pauvres en témoignent comme d’ailleurs plusieurs missions de maintien de la Paix sous l’égide des Nations Unies. Il est donc difficile d’aller à l’encontre de ces valeurs sans soulever la réprobation des canadiens. La tentation est alors forte de les récupérer subtilement pour justifier des interventions que, si elles étaient connues dans leurs avenants et aboutissants, seraient perçues comme allant totalement à l’encontre de ces mêmes valeurs de solidarité humanitaire.

Les exemples de récupération ne manquent pas, surtout en cette période spéciale que nous vivons. Les spécialistes en communication et les lobbys élaborent des plans, choisissent les bonnes expressions qui permettent de couvrir des tractations bien souvent marquées davantage par le marchandage et le chantage que par la recherche d’une véritable cause humanitaire. L’administration Bush n’a-t-elle pas entraîné dans la guerre le peuple américain ainsi que ses élites politiques et religieuses en utilisant ces stratagèmes peu orientés à mettre en évidence la vérité des choses. Nous nous retrouvons ainsi dans la situation où le mensonge est converti en vérité, la récupération en humanisme, nos morts en martyrs et ceux des adversaires en terroristes.

La visite surprise du Premier ministre canadien en Afghanistan avait quelque chose de « déjà vu ». On y retrouve une sorte de parenté entre les spécialistes en communication au service de la guerre en Afghanistan et ceux qui sont au service de la guerre en Irak. On fait souvent appel à la « Communauté internationale », mais sans jamais préciser de qui il s’agit. On pense immédiatement aux Nations Unies qui regroupent 191 membres. Ils sont la représentation de la Communauté internationale et à ce que je sache, cette communauté internationale, ne s’est jamais prononcée en faveur de la guerre en Afghanistan sous le commandement général des États-Unis. Par contre si nous parlons de l’OTAN, nous parlons effectivement du regroupement de 26 pays, soit 13% de la communauté internationale. Il faut dire que l’usage abusif de ce terme permet de couvrir, face à l’opinion publique mondiale, la véritable réalité des acteurs et de leurs compromis réciproques. Lorsque Ben Laden a offert une trêve, y a-t-il eu un Conseil de l’Otan pour décider de la marche à suivre? C’est la Maison Blanche qui a répondu qu’aucune trêve ne l’intéressait.

Il appartient, me semble-t-il, au PEUPLE CANADIEN de se prononcer sur l’engagement du Canada dans cette guerre offensive en Afghanistan. Nous ne sommes pas là pour assurer la paix d’un peuple qui ne nous a jamais agressé ou menacé. Nous sommes là à d’autres fins et s’il y a des préoccupations de paix elles portent davantage sur la paix des forces conquérantes et de leurs alliés sur le terrain.

Si monsieur Harper est le démocrate qu’il dit être, il doit, dans ses décisions, représenter la volonté du peuple canadien. Pourquoi alors, sur cette question précise de l’engagement du Canada dans la guerre en Afghanistan, laquelle implique des milliards de dollars et des vies humaines, ne pas faire dès maintenant un RÉFÉRENDUM NATIONAL sur cette question ? Autrement les canadiens croiront que le vote de M. Bush est plus puissant que le leur et se demanderont à quoi sert notre démocratie si les décisions importantes se prennent ailleurs.

Au moment où le Premier Ministre canadien, en compagnie de nos soldats, se faisait le promoteur de la coopération humanitaire en Afghanistan, le Président de Cuba, à la clôture du 1Xième Séminaire international des premiers soins de santé, se faisait promoteur de cette même coopération, mais cette fois non pas avec des armes, mais avec des milliers de médecins et d’éducateurs. « Nous n’avons d’autre richesse que cette volonté et ce désir de coopérer avec les plus pauvres et délaissés. Cuba dispose de plus de 70 000 médecins, dont 60 000 spécialistes et près de 25 000 qui sont actifs dans le cadre de missions internationales. »

Je pense que la majorité des canadiens seraient heureux d’appuyer des initiatives de cette nature indépendamment des idéologies de ceux qui les inspirent.



Oscar Fortin
14-03-2006

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