lundi 23 juin 2008

CONGRÈS EUCHARISTIQUE 2008: RÉFLEXION D'UN CROYANT "HORS DES MURS"


L’expression «croyant hors des murs » exprime tout à la fois mon appartenance à l’Église, Corps vivant du Christ ressuscité, et ma dissidence par rapport à de nombreuses orientations religieuses, politiques et administratives prises par le Vatican qui en assure la gouverne. Cette distinction est d’autant plus importante que la tendance de certaines autorités à confondre dissidence avec non croyance a pour effet de les soustraire aux interpellations de cette même foi. Lorsque Jésus de Nazareth et les Évangiles sont mis au centre de la vie de foi, il est inévitable qu’ils questionnent en premier lieu ceux et celles qui ont à en assurer le témoignage et le service.

Le Congrès eucharistique international 2008 aura été l’occasion pour tous les croyants, de l’intérieur comme de l’extérieur des murs, de réfléchir et d’échanger sur le sens et le vécu tant de l’Eucharistie que de l’Église qui s’en nourrit. La télévision aura sans doute permis à des millions de personnes à travers le monde de partager les témoignages et les célébrations inscrites au programme officiel. Personnellement, l’intervention de Jean Vanier demeure celle qui m’a rejoint le plus et, à n’en pas douter, également la grande majorité de ceux et celles qui appartiennent à cette Église « hors des murs ». Il faut dire que toute une portion importante de l’Église du Québec s’est abstenue de s’inscrire à ce Congrès en raison d’orientations plus ou moins avouées de faire de ce Congrès un tremplin de promotion visant davantage la consolidation de l’institution ecclésiale et des sacrements rituels que de celle de Jésus et des Évangiles. Il n’y a évidemment pas contradiction entre l’un et l’autre, mais il y a une priorité fondamentale de l’un sur l’autre. Le témoignage de Jean Vanier, le plus percutant de tous, met dans sa véritable perspective la relation de l’un avec l’autre. La personne humaine, particulièrement celle qui se retrouve dans les chaînons les plus faibles de l’humanité, est « le sacrement même de la présence de Jésus qui nous interpelle tous. Tant et aussi longtemps que sa dignité ne lui aura pas été reconnue et respectée, Jésus sera là pour nous le rappeler.

Cette approche rejoint et inspire de nombreux croyants engagés qui prennent la parole et posent des gestes en solidarité avec ces déshérités de la terre. Ils le font également en solidarité avec de nombreuses personnes et organisations non religieuses qui ne peuvent accepter un monde qui crée en grand partie, par ses structures et ses organisations, l’essentiel de cette pauvreté qui affecte plus des deux tiers de l’humanité. Il y a les théologiens et les croyants de la libération qui sont profondément engagés, particulièrement en Amérique latine, au service de la dignité des pauvres et des exclus. Leur engagement dérange et les pressions politiques sur les hiérarchies ecclésiales en font des « hérétiques ». Les appartenances idéologiques et politiques des uns et des autres se manifestent. Les croyants engagés en faveur de la justice sont avec Chavez au Venezuela, avec Morales en Bolivie, avec Correa en Équateur, avec Fidel à Cuba. Les hiérarchies ecclésiales sont dans l’ensemble des alliés des oligarchies locales et nationales. La grande alliance qui unit la Maison Blanche et le Vatican y est sûrement pour quelque chose.

L’actuel Congrès eucharistique n’a pas laissé de place à cette portion de l’Église dont le vécu s’alimente également de l’Eucharistie pour poursuivre son engagement au service de la justice. Pas plus, il n’a ouvert des échanges sur une Eucharistie accessible à toute personne croyante. En effet, comment peut-on inviter à un repas des personnes (divorcées et remariées) tout en leur interdisant de partager la nourriture? Aurait-on oublié que Jésus, lors de la dernière cène, a partagé son pain avec Judas qui avait déjà décidé de le livrer pour trente pièces d’argent et avec Pierre qui allait le trahir dans quelques heures? Qui sommes-nous pour départager ceux et celles qui s’approchent du pain de vie pour s’en nourrir et pour avancer avec foi dans l’existence qu’est la leur? Jésus n’est-il pas venu pour ceux et celles qui en ont besoin? En somme, ce Congrès eût pu donner lieu à plusieurs débats utiles pour l’avenir de l’Église et la foi dans le monde. Sur la question de la participation à l'Eucharistie des couples divorcés et remariés je recommande fortement cet ouvrage du Père Normand Provencher, omi, un des théologiens les plus brillants de l'Église canadienne : « UNE PLACE À PART ENTIÈRE »
(http://store.novalis.ca/comersus_viewItem.asp?idProduct=793)

Pour finir, je vous dirai que je me suis rendu à la messe de clôture sur les Plaines d’Abraham. Je m’y suis présenté en compagnie intérieure de ces millions de personnes sans voix qui souffrent de la famine, des guerres, des manipulations politiques, des tricheries économiques, d’une information le plus souvent tronquée, mais portant dans leur cœur une espérance. J’entretenais avec toutes ces personnes un dialogue intérieur, j’y voyais Jésus avec elles pendant que je regardais les gens circuler autour de moi et les dignitaires s’approcher des balustrades installées à leur intention. Ils nous ont montré les autorités civiles présentes. J’y ai vu la Gouverneure générale avec son conjoint et sa petite fille bien protégés de la pluie. Cette même Michael Jean qui avait participé, à Prague, l’automne dernier à une réunion « secrète » avec quelques hauts représentants étasuniens pour y mettre au point un plan visant l’élimination du Président du Venezuela, Hugo Chavez (http://humanisme.over-blog.com/article-7218536.html) (http://humanisme.over-blog.com/article-7218872.html) . J’ai par la suite écouté l’intervention du pape qui a souhaité un monde où il ferait bon vivre pour tous. C’est, d’ailleurs, le seul moment où il y a eu une brève accalmie dans la pluie. Par la suite ce fut torrentiel.

Je suis reparti avec tout mon petit monde intérieur dont la présence m’interpelle et me réconforte tout à la fois. L’Église, celle dont le Christ est toujours la Tête déborde de toute part les institutions qui s’en font les représentants. La conscience est toujours là et elle est en nous l’autorité suprême : «Au-dessus du pape en tant qu’expression de l’autorité ecclésiale, il y a la conscience à laquelle il faut d’abord obéir, au besoin même à l’encontre des demandes de l’autorité de l’Église. »
(Joseph Ratzinger alias Benoît XVI, 1967)

(http://humanisme.over-blog.com/article-139524.html )

Oscar Fortin

Québec, le 23 juin 2008

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http://humanisme.blogspot.com/

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