Jeudi, le 18 août, Benoît XVI sera reçu en grande pompe en Espagne pour rencontrer les centaines de milliers de jeunes venus de tous les coins du monde. Les organisateurs parlent de 380 000 étrangers et de 120 000 espagnols. Pour les célébrations, présidées par le Pape, on s’attend à une foule oscillant entre un et deux millions de personnes.
De nombreuses voix discordantes se font entendre pour dénoncer pareil déploiement dont les coûts seront de 50 millions d’euros, soit un peu plus de soixante douze millions de dollars US. Elles se réfèrent, entre autres, au contexte de la crise économique mondiale qui affecte de façon particulière les populations du Tiers-monde ainsi que les chômeurs, les travailleurs au salaire minimum de même que les groupes les plus vulnérables que sont les personnes âgées, les malades, les jeunes. Elles sont scandalisées par le fait que l’Église catholique, témoin de Jésus de Nazareth, celui-là même qui s’est fait le plus petit des petits et le serviteur des serviteurs, soit représenté par un personnage qui s’enveloppe de tous les honneurs d’un chef d’État et qui se prête à pareille démonstration, plus près des grands rassemblements de partis politiques en pleine campagne électorale que de la présence humble et sans ambigüité d’un véritable témoin de Jésus.
Ces protestations constituent par elles-mêmes une critique fondée sur ce grand décalage qui existe entre ces représentants hiérarchiques de l’Église institutionnelle et Jésus lui-même. Vraiment, aucune comparaison n’est possible tant sur le plan de l’esprit que de l’engagement. Autant les premiers sont jaloux de leur pouvoir, du rang de leurs fonctions et des avantages et privilèges qui les accompagnent, autant le second se fait humble, dépouillé et fidèle représentant de son Père. « Qui me voit, voit le Père. » Je doute fort que Benoît XVI puisse en dire autant en relation avec Jésus de Nazareth. Si tel était le cas, peu le croirait.
Il faut voir maintenant ce qu’il aura à dire aux grandes puissances qui mettent le feu un peu partout au Moyen Orient, en Afrique et qui ne cessent de tramer des projets criminels en Amérique Latine et ailleurs dans le monde. Trouvera-t-il le courage et l’inspiration qu’il faut pour dénoncer à voix haute ces aventures guerrières de conquête et de pillage, couvertes de mensonges et de manipulation de l’information, que mènent les États-Unis, l’OTAN et le Canada en Libye et d’une certaine façon en Syrie? Aura-t-il le courage du prophète Isaïe pour rappeler à l’ordre ces pays de l’Occident, dit chrétien, qui se réclament de la foi et de Dieu tout en faisant le contraire de ce qu’ils attendent d’eux. Un langage sans équivoque et sans aucune complaisance.
« Cessez d'apporter de vaines offrandes : J'ai en horreur l'encens, Les nouvelles lunes, les sabbats et les assemblées ; Je ne puis voir le crime s'associer aux solennités. Quand vous étendez vos mains, je détourne de vous mes yeux ; Quand vous multipliez les prières, je n'écoute pas : Vos mains sont pleines de sang. Apprenez à faire le bien, recherchez la justice, Protégez l'opprimé ; Faites droit à l'orphelin, Défendez la veuve. » (Is.1, 13-17) »
"Malheur à ceux qui ajoutent maison à maison, et qui joignent champ à champ, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'espace, et qu'ils habitent seuls au milieu du pays ! Malheur à ceux qui appellent le mal bien, et le bien mal, Qui changent les ténèbres en lumière, et la lumière en ténèbres, Qui changent l'amertume en douceur, et la douceur en amertume; Qui justifient le coupable pour un présent, Et enlèvent aux innocents leurs droits ! Malheur à ceux qui prononcent des ordonnances iniques, Et à ceux qui transcrivent des arrêts injustes, pour refuser justice aux pauvres, et ravir leur droit aux malheureux de mon peuple, pour faire des veuves leur proie, et des orphelins leur butin ! "(Is.5-10)
Voilà le langage qui correspond aux témoins de Jésus de Nazareth. Les temps que nous vivons n’ont pas tellement changé quant à cette dynamique des relations entre puissants et faibles. Ce n’est pas le grand-prêtre de l’époque qui a eu le courage de cette parole, mais un prophète, libre des institutions et disponible à la volonté de Dieu. Aujourd’hui où sont passé les prophètes? Ils sont là, soit muselés par les hiérarchies ou encore isolés dans les coins perdus d’un diocèse ou d’une prison. N’empêche, certains parviennent tout de même à parler et à faire entendre la parole de celui qui a donné sa vie pour que la vérité soit proclamée à toute personne de bonne volonté. Ils ne sont évidemment pas sur les estrades à se faire applaudir et admirer, mais dans les rues à faire entendre une parole de vie et de solidarité.
Benoît XVI dispose d’une tribune extraordinaire pour reprendre sa condamnation des bombardements de l’OTAN en Libye et pour dénoncer en des termes non équivoques le capitalisme qu’il avait alors décrit de la manière suivante :
« Face aux abus du pouvoir économique, face aux actes de cruauté d’un capitalisme qui ravale les hommes au rang de marchandise, nos yeux se sont ouverts sur les dangers que recèle la richesse, et nous comprenons de manière renouvelée ce que Jésus voulait dire quand il mettait en garde contre la richesse, contre le dieu Mammon qui détruit l’homme et qui étrangle, entre ses horribles serres de rapace, une grande partie du monde. » Joseph Ratzinger, Jésus de Nazareth, tome 1, (p.120)
Le seul fait de reprendre ces déclarations et prises de position, plutôt ignorées par nos médias occidentaux, donnerait à cette rencontre un ton qui ne saurait passer inaperçue.
Oscar Fortin
Québec, le 17 août 2011
Le pape se doit d' annoncer un message d' amour, de paix et de miséricorde. Mais il doit aussi, de façon urgente, dénoncer ceux qui sont responsable des innegalités et de la pauvreté dans le monde en exemple, FMI, banque mondiale et autre milieu financier.
RépondreEffacerLe Pape ne peut servir deux maitres. Dieu ou l'argent
G de la Vallières
Bonjour Oscar.
RépondreEffacerQuel gâchis !
Le moins que l'on puisse dire est que ces JMJ ne font pas l'unanimité, même chez les jeunes espagnols.
Personne n'a jamais fait passer des idées par la force ou le conflit; quelle erreur de la part de cette frange du catholicisme !
Connaissez-vous le site Mediapart ? Génial pour la France, mais aussi pour tout le monde. Ce site vient de publier un "Appel" ... à signer des deux mains (on commence par l'Europe, et après on continue).
A bientôt.
Agnès Gouinguenet.
http://gouinguenetagnes.blogspot.com
Bonjour Agnès, heureux de vous retrouver avec votre commentaire. Je reviens du site Mediapart que vous m'avez suggéré. C'est une référence qui me laisse avec une très bonne impression. Je l'ai mis dans mes préférés.
RépondreEffacerMerci et bonne chance
Bonjour Oscar,
RépondreEffacerTout pouvoir humain se structure. Malheureusement l'Église n'y échappe pas. Le pourvoir en soi se structure, se hiérarchise, se constitutionnalise, s'étatise et tend à se mondialiser. C'est ce qui est arrivé à la "sainte" Église catholique qui se perçoit et tend à devenir Une, Sainte et Apostolique. La papauté devrait être seulement un service prophétique de communion des différences. Hélas, elle a beaucoup de chemin à parcourir pour y arriver! Gardons la foi et l'espérance.
Bonne route!