Les
premières semaines de ce nouveau pape François nous le font découvrir comme un
homme simple qui se veut toujours plus près des gens humbles. Il se présente
moins comme un monarque disposant de tous les pouvoirs divins que comme un simple
serviteur, épris d’Évangile et amoureux de celui qui en est le personnage
central, Jésus de Nazareth. Un style qui tranche d’avec celui de Benoît XVI qui
ne voyait pas de différence entre la vanité et l’humilité, entre la suffisance
autoritaire et le service à la vérité.
Les
défis qui attendent le pape François sont nombreux et de tous ordres. Il ne
peut se permettre aucune tricherie, les pauvres et les peuples ne le lui
pardonneraient pas. Ils ne veulent pas d’un pape qui soit tout simplement plus gentil
avec eux et plus accessible par sa façon d’être, mais ils veulent un pape qui soit vraiment l’un d’eux.
Dans
ses interventions, le langage utilisé et les mots doivent retrouver leur pleine
signification. En ce sens, bien des mots doivent être reconfigurés entre eux de
manière à les harmoniser avec le message évangélique comme par exemple le mot
charité avec le mot justice, le mot-vérité avec le mot dénonciation, le mot
autorité avec le mot service, etc.
On confond
trop souvent justice avec charité, on s’en tient généralement à la vérité dans
un sens générique sans y dénoncer les auteurs du mensonge et on parle
d’autorité sans en faire d’abord et avant tout un service. On parle de
soumission sans relever les mille formes de domination. S’il y a un Jésus bon,
tolérant et miséricordieux, il y en a également un qui met à la porte les vendeurs
du temple et qui sermonne sans retenue les prêtres, les pharisiens et les docteurs
de la loi qui sont devenus de véritables sépulcres blanchis. Cela, le pape
François ne peut le passer sous silence, pas plus que les disciples de Jésus à
travers le monde.
Mt 21 12 Jésus
entra dans le temple et chassa tous ceux qui vendaient ou qui achetaient à cet
endroit ; il renversa les tables des changeurs d'argent et les sièges des vendeurs de pigeons.
Mt.23, 27 Malheur à vous, scribes et Pharisiens hypocrites, qui ressemblez à des sépulcres blanchis
: au-dehors ils ont belle apparence, mais au-dedans ils sont pleins d'ossements
de morts et de toute pourriture
Il
ne fait pas de doute que le premier défi du pape François est celui d’asseoir
sa crédibilité sur des décisions et des engagements qui confirmeront
l’authenticité de son attachement absolu au message évangélique et aux humbles
de la terre. Un attachement qui se révélera transcendant à toutes ces doctrines,
héritées d’une histoire institutionnelle de près de 1700 ans, plus souvent que
moins, problématique et à des alliances, non moins problématiques de cette même
Église, avec les puissances de ce monde. Ce sont là des interpellations
incontournables.
Il
doit reprendre à son compte chacune des trois tentations de Jésus au désert et
au nom de ce dernier, il doit dire non à chacune d’elle pour les temps que nous
vivons. Il doit dire non à la tentation
de l’ « avoir » (1re tentation), il doit dire non à la tentation du pouvoir de domination (2e
tentation) et il doit dire non à la tentation du paraitre et des grandeurs (3e tentation). Luc. 4,1-11
Dans le premier cas, ce sera le rejet
de toute richesse matérielle se présentant comme une réserve pour « au cas où » le Père ne
s’occuperait pas de son Église. La banque du Vatican devra être dissoute et ses
avoirs, retournés aux pauvres. Un
premier acte de foi.
Dans le second cas, c’est l’abandon de
l’État du Vatican et de tous ses liens avec les puissances qui dominent et
dirigent le monde, marquant ainsi que son avenir ne dépend pas de ces liens.
Les alliances du Vatican avec les puissances occidentales, tout
particulièrement avec Washington, sont amplement documentées. Le pape François
devra mettre fin à ces alliances qui ont déjà fait couler trop de sang en
Amérique latine et dans le monde. Un
second acte de foi.
Dans le troisième cas, c’est le rejet
de tout ce qui alimente l’importance des apparences tant dans l’habillement, le
logement, que dans les célébrations liturgiques. Les titres de noblesse et de
grandeurs doivent disparaitre. Les ornements religieux doivent être ramenés à
leur plus simple expression. Les signes distinctifs doivent être inscrits dans
les comportements et engagements de chacun et de chacune au service de la
justice, de la vérité, de la compassion, de la solidarité et de la miséricorde.
L’eucharistie doit retrouver sa place au milieu d’un repas partagé entre gens
de bonne foi en communion avec le ressuscité. Troisième acte de foi.
François,
le pape venu de la fin du monde, doit reprendre à son compte, pour les temps
qui sont les nôtres, la vocation de Jésus de Nazareth venu annoncer, il y a
deux mille ans, les nouveaux paradigmes d’un règne de paix, de justice, de
vérité, de bonté, de solidarité, de compassion et de miséricorde. Un règne où
les plus grands se font les plus petits et les plus petits sont considérés
comme les plus grands.
Voilà
ce que m’inspire cette page extraordinaire où l’Église d’un empire redevient
l’Église des humbles et des pauvres de la terre. Une Église qui délaisse les
enseignements d’une doctrine pour retrouver ceux des Évangiles. Une Église
enfin libérée d’une cuirasse asphyxiante pour retrouver la foi libératrice d’une
Église porteuse de vie. Une Église en qui existe l’espérance qu’un autre monde que
celui de l’avoir, du pouvoir et du paraitre est possible.
Oscar
Fortin
Québec,
le 9 avril 2013
Il y a beaucoup de vrai dans ce que vous dites. Quelle candeur ! Pour le reste, il y a des idées auxquelles je résiste, mais qui portent sérieusement à la réflexion. C'est vrai : on ne peut pas servir deux maîtres, Dieu et l'argent. Plusieurs, à travers des jeux politiques, enivrés d'orgueil et de pouvoirs, tentent de justifier cette relation. Ce n'est pas bien à mon avis.
RépondreEffacer