mardi 26 juillet 2016

LE CANADA A PERDU TOUTE CRÉDIBILITÉ INTERNATIONALE






LA RIGUEUR DE STÉPHANE DION, L’UNIVERSITAIRE, NE FAIT PLUS PARTIE DU MINISTRE QU’IL EST DEVENU. (RÉPONSE À SA LETTRE)

Monsieur le Ministre,

En tout premier lieu, je tiens à vous remercier pour avoir donné suite à ma correspondance de février dernier. Je sais que les dossiers et les lettres auxquelles vous devez répondre ne manquent pas.

J’ai lu attentivement votre lettre qui m’a interpellé sur de nombreux points que je me permets de partager avec vous.

Une première impression générale se dégage en relation à la rigueur du professeur universitaire que vous étiez avec celle du ministre que vous êtes devenu. 

Pour l’Ukraine, vous passez outre au fait que des forces, préparées et soutenues par les États-Unis, ont renversé un gouvernement, légitimement élu. Vous passez également sous silence le rejet de cette usurpation de pouvoir par une partie importante de la population ukrainienne, particulièrement celle du Donbass et de Crimée.
Ce rejet s’est concrétisé, pour la population de Crimée, par un référendum portant sur son affranchissement de la gouvernance illégale des putschistes de Kiev pour être rattachée à la Fédération russe. C’est avec une grande majorité que le « oui » l’a emporté et que la Russie, à leur demande, l’a aussitôt reconnu comme membre à part entière de la Fédération russe. Par contre, les populations du Donbass n’eurent pas les mêmes opportunités et durent se préparer à un dur combat. De fait, ils furent victimes de tueries sauvages et de massacres qui pourraient être jugés comme crimes de guerre.

Dans votre lettre, vous évoquez le droit international que vous appliquez à la population de Crimée sans toutefois en faire une référence au nouveau Gouvernement de Kiev et à ses mentors. N’ont-ils pas usurpé par des moyens non démocratiques le pouvoir d’un État sous la gouvernance d’un gouvernement démocratique ?

« “Le droit international interdit l’acquisition par la coercition ou la force d’une partie ou de l’ensemble du territoire d’un autre État. Cet acte va à l’encontre des principes sur lesquels le système international est fondé.”

Vous conviendrez avec moi que la population de Crimée est bel et bien sur son propre territoire et se trouve face à un envahisseur étranger qui s’est emparé du pouvoir central de Kiev. Dans pareilles circonstances, qui n’auraient pas agi de même ? Par ce référendum, le peuple ukrainien de Crimée a décidé de son indépendance et de son rattachement à la Fédération de Russie.

Dans votre correspondance, vous poursuivez :

Le Canada appuie le peuple ukrainien et s’attend à ce que la Russie participe pleinement au processus de paix de Minsk, notamment en cessant d’approvisionner et de soutenir les insurgés dans l’est de l’Ukraine ainsi qu’en respectant totalement la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Vous parlez des populations du Donbass comme si elles ne faisaient pas partie du peuple ukrainien. Ce sont pour vous des rebelles alors que les manifestants de la Place Maïdan représentaient sans doute pour vous la voix du peuple. Quant à Minsk, je vous dirai que les propos que vous avez tenus aux autorités ukrainiennes m’ont particulièrement surpris. Plutôt que d’insister sur l’importance, pour ces dernières, de donner suite dans les plus brefs délais à leurs engagements pris à Minsk, vous insistez pour que ce soit particulièrement la Russie qui donne suite à ses engagements. Les ententes à concrétiser ne se font pas entre le gouvernement central de Kiev et celui de la Russie, mais avec les populations de Lougansk et de Donetsk. C’est avec elles que le gouvernement de Kiev doit s’entendre sur la base des propositions de Minsk.

“J’ai aussi souligné l’importance d’appliquer de façon exhaustive les accords de Minsk, en particulier par la Russie, afin d’instaurer une paix durable en Ukraine.”

Vous savez comme moi que cet accord prévoyait, pour fin 2015, des changements constitutionnels favorisant une décentralisation des régions de Donetsk et de Lougansk. Or rien de tout cela n’a été fait de la part du gouvernement central. Il s’agit d’un point excessivement important pour la paix dans la région. N’était-il pas de votre devoir d’insister pour que le gouvernement central donne suite le plus rapidement possible à ces engagements constitutionnels ? Je sais que M. Poutin insiste beaucoup pour que cette décentralisation soit inscrite dans la constitution.

Je conclus cette première partie en mettant en question votre postulat de base qui fait de la Russie l’agresseur de l’Ukraine et qui laisse dans l’ombre les véritables interlocuteurs du gouvernement central que sont les populations du Donbass..

“Face à l’agression militaire et à l’occupation illégale par la Russie, le Canada a pris un certain nombre de mesures pour soutenir le peuple ukrainien, à l’heure où celui-ci s’efforce de rétablir la stabilité politique et économique, y compris l’imposition de sanctions contre les responsables de la crise actuelle.”

Le professeur de Science politique a vraiment perdu de sa rigueur en devenant ministre des Affaires étrangères du Canada.


Pour la Syrie, paradoxalement, la position du Canada est à l’opposé de celle adoptée pour l’Ukraine. Les rebelles sont devenus des alliés et le gouvernement central de Bachar al Assad, l’ennemi à abattre. Le respect du droit international ne fait plus partie du débat. Les États-Unis et ses alliés, dont le Canada, peuvent se permettre d’entrer et de sortir de la Syrie comme s’il s’agissait d’un territoire sur lequel ils auraient tous les droits. Je me permets de reproduire ici votre citation antérieure, appliquée à la Crimée.

“Le droit international interdit l’acquisition par la coercition ou la force d’une partie ou de l’ensemble du territoire d’un autre État. Cet acte va à l’encontre des principes sur lesquels le système international est fondé.”

Vous faites également état de toutes ces victimes de la violence gouvernementale. Je remarque que votre grande sensibilité pour la répression sanglante dont furent victimes les opposants au gouvernement de Bachar al Assad contraste avec votre silence sur la répression et les massacres dont furent victimes les populations de Lougansk et de Donetsk. Il faut croire que vos sources d’information n’ont pas été mises à contribution pour couvrir ces massacres dans ces régions de l’Ukraine. Il en fut de même avec nos médias officiels qui se gardèrent bien de lever le voile sur ces attaques meurtrières de la part du gouvernement de Kiev et de leurs alliés, dont le Canada.

Je reviens à votre lettre, traitant de la Syrie. Vous déclarez qu’il appartient au peuple syrien de décider de son propre destin.

Le Canada a appelé la communauté internationale à se mobiliser et à défendre le droit du peuple syrien à décider de son avenir.”

Il s’agit là d’une déclaration avec laquelle la Russie et ses alliés sont bien d’accord. Ces derniers répètent à qui veut l’entendre que seul le peuple syrien dispose du pouvoir de décider de ses gouvernants et de son Président.

Par contre dans votre lettre vous revenez avec le fait que le Président Bachar al Assad ne fait pas partie de la solution et qu’il doit partir. Vous parlez comme si c’était la coalition occidentale et non le peuple qui avait ce pouvoir de disposer de l’actuel Président.

“Le Canada est convaincu qu’un règlement politique négocié est la seule façon de mettre fin à la crise syrienne. Le maintien au pouvoir d’Assad ne peut faire partie de quelque solution réaliste que ce soit.”

Faut-il comprendre que les négociations de paix seraient conditionnelles au départ de l’actuel Président ?

Je vous rappelle qu’en février, 2012, le peuple syrien s’est donné, avec une forte majorité, une nouvelle constitution, qu’en juin, 2014, il y eut une élection présidentielle, remportée par le président Bachar Al Assad et qu’en avril 2016, il y eut des élections législatives. Il est évident que ce référendum et ces élections n’ont pas été sous le contrôle de Washington. Sont-elles pour autant moins crédibles que celles dirigées de l’extérieur par l’occident ?

Je vous invite à prendre connaissance de l’intervention du Président de Russie, Vladimir Poutine, au 27e Sommet de la Ligue arabe. Il a dit entre autres ceci en relation à la lutte contre le terrorisme et au respect de la souveraineté des peuples :

Il faut faire face à ce mal et l’accompagner d’efforts conjoints, censés assurer le règlement politique des crises en Syrie, en Irak, en Libye, au Yémen et dans d’autres zones chaudes”, a poursuivi M. Poutine, soulignant la nécessité de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les pays de la région. »

Pourquoi le Canada tarde-t-il à faire siens, dans la pratique, ces principes du droit international, de les respecter sans détour et sans faux fuyants. Toutes ces révolutions de couleur, ces luttes contre le terrorisme et contre la drogue ne sont, dans bien des cas, que des couvertures pour s’infiltrer dans des pays et en prendre le contrôle. Même le recours à l’aide humanitaire en est venu, pour certains, à servir de couverture pour mieux s’infiltrer au sein des populations pour mieux les manipuler. Vous êtes bien placé pour le voir et le savoir. En couvrir la réalité est en devenir complice.

Je regrette le Canada de l’honorable Lester B. Pearson qui a fait luire, le temps d’une décennie, l’étoile internationale du Canada comme une référence internationalement reconnue pour la paix dans le monde.

Si vous le vouliez, vous pourriez en faire tout autant aujourd’hui. Il vous suffit de retrouver votre propre indépendance et d’en faire tout autant avec celle du Canada, devenu honteusement une dépendance des politiques interventionnistes de Washington. Il faut laisser de côté le langage formaté qui ne fait que couvrir par des mensonges et la manipulation des actions de conquêtes et de domination. Retrouvez le langage direct de la vérité, brisez ces frontières artificielles qui vous isolent d’une partie importante du monde. Vous n’êtes pas obligé de faire des ennemis de vos partenaires vos propres ennemis. Le Canada mérite plus que cela.

Oscar Fortin
Le 26 juillet 2016



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