LES
NEURONES CONTRE LES GROS BRAS
La tournée
récente de Donald Trump au Moyen-Orient, en Israël et en Europe a mis en
évidence le caractère prédominant de ce Président qui sait s’imposer là où il le
veut, et comme il le veut. Son personnage représente bien le vrai visage d’un
empire qui repose avant tout sur sa puissance financière et militaire.
Cette puissance lui permet de décider ce qui est bien et ce qui est mal pour la
sécurité et les intérêts des États-Unis d’Amérique. Il a le pouvoir d’imposer
des sanctions qui rappellent aux récalcitrants et insoumis que leur sort repose
entre ses mains. Ils n’ont qu’à être gentils et à payer leur dîme annuelle pour
bénéficier de sa protection.
Il ne lui a fallu que 100 jours pour que ses promesses électorales,
visant, entre autres, la gouvernance interne des États-Unis et son retrait de
la gouvernance mondiale, s’évaporent en fumée. Voici ce que
j’écrivais au lendemain de son élection :
« L’enthousiasme,
suscité par la victoire de Donald Trump, repose, entre autres, sur le fait
qu’il se présente comme une alternative indépendante pouvant mettre fin à un
système qui nivelle, à l’interne, le nationalisme profond du peuple et ses
intérêts au profit des plus nantis et, à l’externe, qui impose au
monde un ordre mondial dont il est le seul maître. En fin de
compte, il remet en
question l’État profond existant, dominé par quelques grandes
familles et grandes institutions financières et industrielles. Ses promesses
électorales parlent de redonner le pouvoir au peuple et de mettre fin à cette
politique impériale de conquête et de domination. De quoi susciter beaucoup
d’espoir chez ces millions d’étasuniens qui vivent dans l’anonymat d’une
pauvreté qui est loin de l’emblème d’un pays qui se dit riche et démocratique.
Il en va de même pour de nombreux pays qui vivent sous la tutelle de l’empire
ou qui en sont constamment menacés. »
Celui qui se réclamait de n’avoir que des
paroles se transformant en réalisations s’est vite révélé comme celui dont les
actions allaient à l’encontre de ses paroles. Loin de réduire la présence
militaire des États-Unis dans le monde, il en augmente la présence à un rythme
accéléré. Les navires de guerre, les porte-avions se
déplacent dans le Pacifique et les
bases militaires dans le monde se renforcent et se multiplient. Il privilégie
les dépenses militaires. Il n’a pas
attendu la permission de qui que ce soit pour lancer 59
missiles sur le territoire syrien. Il a fallu qu’on lui dise que Bachar Al
Assad avait utilisé des armes chimiques pour qu’il l’attaque. Pas question pour
lui de vérifier si les informations reçues étaient fondées. De toute évidence, il se révèle imprévisible
dans ses actions et de moins en moins fiable dans ses engagements.
En Amérique du Sud, il fomente, par l’intermédiaire
de l’OEA, une coalition entre les pays qui lui sont soumis pour envahir
militairement le Venezuela en vue d’y récupérer les pouvoirs de l’État et les
richesses du pays. Sur ce plan, il ne fait que poursuivre les politiques
d’Obama tout en les renforçant par des interventions financières plus
importantes et par des moyens plus musclés. La question du droit international des
peuples à disposer d’eux-mêmes n’a aucune incidence dans ses décisions. La
corruption, la manipulation, la violence font partie de ses moyens. Il a été
entièrement récupéré par l’État profond, celui qui règne aux États-Unis et dans
le monde.
À cet empire et à ses vassaux
s’opposent, comme puissances dominantes, la Russie et la Chine. Vladimir
Poutine et son homologue chinois, Xi Jinping, ont une approche totalement
différente de celle adoptée par l’Empire. L’un et l’autre se fondent sur le
respect du droit international des peuples et des États à disposer
d’eux-mêmes. Leurs conquêtes ne se font
pas par la force, mais par des alliances mutuellement consenties, répondant
objectivement aux intérêts des principaux intervenants. Ils sont l’antithèse
d’une mondialisation unipolaire sous la gouvernance de l’empire étasunien.
L’air de rien, ces deux puissances se sont donné
les moyens de contrer les volontés impériales. Elles sont indépendantes et
souveraines, se déplaçant dans le monde comme bon, il leur semble. Leurs
discours et leurs engagements se rejoignent dans ce projet d’un monde
multipolaire, fondé sur le respect de chacun des peuples et des États et sur la
recherche d’une complémentarité assurant l’harmonie et la paix. Une telle
approche frappe de plein fouet les volontés dominatrices d’un monde unipolaire
sous la gouvernance de l’empire. Il s’agit d’un enjeu de vie ou de mort pour l’Empire
et ce monde unipolaire sous sa gouverne. En ce sens, on peut dire que la troisième
guerre mondiale est déjà commencée et que l’étape des affrontements qui se fait actuellement par pays interposés,
comme c’est le cas en Syrie et en Ukraine, est à la veille d’éclater à un
niveau plus élargi.
À ce jour, la Chine et la Russie ont résisté aux
provocations multiples dont il furent l’objet sous de multiples formes. Pendant
que les muscles de l’Empire se manifestent et font entendre le bruit de leurs bottes
de guerre, La Russie et la Chine
raffinent leurs armements, élargissent leurs liens avec d’autres peuples et ne
manquent pas d’accentuer les fissures qui se manifestent au sein des grandes
Alliances occidentales, tels l’Union européenne, l’OTAN, l’OEA et certains
grands traités commerciaux. Dernièrement, le premier ministre chinois a fait
une tournée importante pour renforcer la
route de la soie. Une entente a été conclue avec le Chili, un allié
traditionnel de Washington. Pour sa part, Vladimir Poutine a assuré le
Venezuela de son soutien dans cette lutte qu’il mène contre les forces de
l’Empire qui cherche par tous les moyens à intervenir militairement comme il le
fit en Ukraine, en Libye et en Syrie. Le président Maduro a fait un appel
formel à la Russie pour qu’elle l’aide pour contrer cette invasion. Il est
évident que ce support permettra à Vladimir Poutine de prendre pied en Amérique
latine et de bénéficier des avantages que représente le Venezuela avec ses
richesses naturelles, dont le pétrole et certaines des grandes mines.
Tout cela pour dire que l’une des deux approches
doit disparaître et que ce ne sera possible que par la destruction physique de
l’une ou de l’autre. L’Empire ne saurait survivre à un monde multipolaire, pas
plus d’ailleurs qu’un monde multipolaire
ne saurait exister sous la gouverne d’un Empire. Il est possible que les
premières frappes qui vont faire
déborder la confrontation à un niveau mondial se réalisent contre la Corée du
Nord. À partir de ce moment, tout peut devenir possible. On ignore toujours ce
dont la Corée du Nord est capable. La Chine et la Russie ne sauraient rester
les bras croisés.
Oscar Fortin
Le 28 mai 2017
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