SUITE À LA
CONVOCATION DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUANTE
Le 1er mai dernier, le président du Venezuela,
Nicolas Maduro, conformément aux dispositions de l’article 347 de la
constitution, a signé le décret par lequel il convoque à une Assemblée
nationale constituante, comme voie de sortie à une situation où les
représentants de l’opposition officielle se refusent à s’asseoir à une table de
concertation y de négociation avec les représentants du gouvernement.
Il faut dire que l’actuation de cette opposition va plus
dans le sens de créer les conditions pour renverser le gouvernement par un coup
d’État, fomenté de l’extérieur, que de procéder par les voies politiques et constitutionnelles. La convocation de
l’Assemblée nationale constituante se veut une réponse pacifique à cette
situation de fait. Elle constitue le pouvoir suprême du peuple qui sera en
mesure d’étudier les alternatives et de procéder aux ajustements
institutionnels nécessaires de manière à résoudre les problèmes qui se
présentent. Selon l’article 349, aucun pouvoir institutionnel ne pourra en
modifier les décisions.
Il importe de rappeler que l’opposition vénézuélienne
maintient des relations privilégiées avec Washington et le secrétaire général
de l’Organisation des États américains (OEA), Luis Almagro. Ces relations lui
permirent, d’une part, le promouvoir
l’actualisation de la Charte
démocratique de l’OEA, ouvrant ainsi la porte à une intervention militaire
étrangère et , d’autre part , diffuser à grande échelle à travers les médias,
au service des intérêts de l’Empire, une image du gouvernement de Nicolas
Maduro qui en fait le grand responsable de tous les maux que connaît le pays.
À ces deux alliés de l’opposition, il faut également ajouter
l’appui infatigable et persistant de la Conférence épiscopale du Venezuela.
Elle sait utiliser tous les moyens à sa portée pour dénigrer l’actuel
gouvernement, en confirmer la faillite dans sa tâche gouvernementale, incapable
de résoudre les problèmes que vit la population vénézuélienne. Voici ce qu’on
peut lire dans leur Déclaration que je me permets de traduire : « Pt
6 : On ne peut oublier ni laisser de
coté la tristesse et la souffrance que ce régime génère chez à notre peuple. »
Dans ce scénario de l’opposition et de l’Épiscopat, on ne
parle évidemment pas des conquêtes révolutionnaires dans les secteurs de la santé, de
l’éducation, du logement, pas plus, qu’on parle des autres facteurs qui
génèrent ces problèmes d’accès aux produits essentiels, tels ceux de
l’alimentation et des médicaments. Ils ne disent rien de cette guerre
économique qui joue un rôle important dans la distribution de ces biens
essentiels, dans le climat social, politique et économique. Tout est dit et fait pour couvrir ces
facteurs extérieurs par leur silence et pour reporter sur le gouvernement la
source de tous ces maux. L’objectif recherché est que le peuple se retourne
contre son gouvernement et rende plus facile le changement de régime recherché.
Il y a un coupable, un seul coupable et c’est le gouvernement bolivarien et
socialiste.
En dépit de tous ces camouflages, le peuple vénézuélien
maintient un appui fort à son gouvernement et sur le régime sur lequel il
s’appuie. La Conférence épiscopale, dans sa Déclaration, ne voit pas les trois
millions de vénézuéliens et Vénézuéliennes qui ont gonflé les rues du centre de Caracas, le 19
avril dernier. Ils n’étaient pas là pour tirer des pierres à Nicolas
Maduro, mais pour le conforter de leur
appui dans la lutte qu’il mène pour assurer la paix et le mieux-être du peuple
vénézuélien. Ils sont également là pour l’appuyer dans son appel incessant à
l’opposition pour qu’elle vienne s’asseoir à une table de concertation et de
discussion en vue de trouver des solutions constitutionnelles pour résoudre les
problèmes et retrouver la paix.
Il faut noter que ce qui intéresse le plus cette opposition
et ses principaux alliés, auxquels
figure au premier rang Washington, c’est la prise de contrôle de l’État par une
intervention militaire qui peut compter avec la quatrième flotte étasunienne à
proximité dans le Pacifique et les sept bases militaires étasuniennes en
Colombie, pays voisin du Venezuela. Par cette action militaire, la constitution serait remplacée par une
autre, rédigée, cette fois, depuis Washington, de sorte que l’État serait
entièrement sous contrôle de l’Empire et ses richesses seraient gérées en fonction des intérêts de ce dernier.
La violence dont est victime le Venezuela est de même nature
que celle utilisée dans d’autres pays, telles l’Ukraine, la Libye, la Syrie,
entre autres. L’empire ne peut tolérer des gouvernements récalcitrants à ses
volontés et à ses intérêts, surtout s’ils disposent de grandes richesses.
Contrairement aux guerres anciennes, l’approche privilégiée est de créer
subtilement le mécontentement de la population et générer par diverses astuces
le chaos dans le pays. Il faut voir ce qu’on en dit dans le cadre des révolutions de couleurs, fabriquées de toute pièce.
Dans le cas présent du Venezuela, le président Maduro met à
l’épreuve la démocratie de ceux qui veulent intervenir militairement au nom
même de la démocratie. Sa convocation à une Assemblée nationale constituante
est une manière de faire appel au peuple lui-même, fondement de toute démocratie, pour résoudre
les problèmes. Cette constituante sera formée de 500 personnes, élues par vote
direct. Elles viendront de toutes les régions, de tous les secteurs d’activité
sociaux, politiques, économiques. Cette Assemblée disposera du pouvoir suprême
du peuple pour résoudre les problèmes qui se retrouvent dans un cul-de-sac.
Aucun autre pouvoir ne pourra s’opposer aux décisions prises qui tiendront lieu
de constituantes (art.349). Quoi de plus démocratique que le pouvoir du peuple
pour le peuple ?
C’est dans ce contexte que la Conférence épiscopale a
transmis, ce 5 mais 2017, ses commentaires relatifs
à cette Assemblée constituante, réclamée par le président Maduro. Dans sa
Déclaration, elle considère que
l’immense majorité de la population perçoit cette initiative comme une
diversion pour détourner les yeux des urgentes nécessités du pays et comme un
pas de plus dans la remise en cause de
l'État de droit prévu par la Constitution actuelle ( Pt.2)
À la lumière de cette approche, tout laisse entendre qu’elle
n’a rien vu passer de ces trois millions de personnes qui ont apporté leur
soutien au Gouvernement, pas plus qu’elle n’a vu les centaines de milliers de
travailleurs et travailleuses se joindre au Président pour célébrer la fête du Travail.
Il faut reconnaître que
derrière tous ces discours, il y a toujours cette obsession idéologique contre
tout ce qui peut s’apparenter à communisme, socialisme, marxisme, etc. Là se
trouve l’objectif principal des interventions de cet épiscopat. Il lutte pour faire disparaître, ce que
Chavez a qualifié de « socialisme
du XXIe siècle ». Au point 4 de leur intervention, la Conférence
épiscopale qualifie ce socialisme du XXIe s. et, par le fait même, le
gouvernement, « de système totalitaire, militariste, policier, violent,
oppresseur qui est à l’origine de tous les maux dont souffre le pays. »
Avec cette déclaration, les
évêques nous renvoient au siècle dernier. Comment peuvent-ils confondre le
gouvernement du Venezuela avec un régime totalitaire, militariste, policier,
violent et oppresseur ? On a comme l’impression de revenir à l’époque de
Reagan et de Jean-Paul II dans leur combat conjoint contre le communisme.
Aujourd’hui, nous savons tous ces crimes auxquels cette lutte anticommuniste a
donné lieu. À cette époque, les dictateurs étaient les bienvenus, les
tortionnaires et les assassinats faisaient partie des dommages collatéraux. Les
femmes en blanc d’Argentine nous rappellent avec force en ces jours-ci, les
drames vécus, la douleur supportée, souvent sans réconfort de ces autorités
épiscopales, plus près des dictateurs que de leurs victimes. Ce que nous révèle
le Plan Condor devrait faire réfléchir ces nouvelles générations d’évêques. Il
faut bien admettre que celle qui préside présentement l’Épiscopat au Venezuela
est loin d’avoir tiré les conclusions de ces drames.
Cette complicité de
l’Église avec l’Empire pour lutter contre le communisme est confirmée par un premier
pacte signé, en juin 1982, entre le pape
Jean-Paul II et le président Reagan. La levée du secret sur ce pacte nous
permet d’en connaître le contenu. Le second pacte, signé en mars 2014, nous
en suggère plus qu’il nous en révèle le contenu. Toutefois, selon l’analyse que
j’en fais, tout semble aller dans la même direction. Il ne fait pas de doute
que la position des évêques du Venezuela et ceux dans les pays émergents vont
en ce sens.
Dans ce contexte et dans
l’esprit suggéré par ces Pactes, comment comprendre une telle coopération de
l’Église avec le grand maître du capitalisme sauvage que condamne avec force le
pape François dans son Exhortation apostolique Evangelii
Gaudium ?
D’une part, l’Église s’attaque à ceux qui luttent justement contre ce
capitalisme sauvage, ce qui est le cas du Venezuela, de la Bolivie, de
l’Équateur et d’autre part elle dénonce avec force ce capitalisme et invite les
peuples et les gouvernements à y mettre fin. Il faut dire que l’Église n’en est
pas à ses premières contradictions.
Les positions prises par la cupule de la Conférence
épiscopale vont totalement dans le sens inverse de l’Exhortation apostolique du
pape François. Plutôt que d’appuyer un gouvernement qui vise à détruire ce
capitalisme sauvage, elle se place en situation de collaboration pour ouvrir la
voie aux grands acteurs de ce capitalisme sauvage.
N’est-il pas scandaleux que ces évêques, que l’on considère
comme instruits, voués à la proclamation du message des Évangiles et à la
promotion de la doctrine sociale de l’Église n’aient pas trouvé le temps pour
approfondir cette doctrine sociale de l’Église pas plus d’ailleurs pour
approfondir ce socialisme du XXIe siècle que le catholique Chavez voyait comme
une expression concrète de la doctrine sociale de l’Église?
Je m’exprime de cette
manière parce que je me suis prêté à l’exercice visant à approfondir le lien
entre ce socialisme et la doctrine sociale de l’Église. Pour se faire, j’ai
’analysé les politiques développées par la révolution bolivarienne et je les ai
confrontées avec la pensée sociale du pape Jean XXIII, tel qu’exprimé dans ses
deux Encycliques, Mater et Magistra et
dans celle portant le titre merveilleux de Pacem in terris. Vous trouverez tous
les liens pertinents à cet exercice en lisant cet article sous le titre : JEAN
XXIII PRÉCURSEUR DU SOCIALISME DU XXIe s.
De toute évidence ,l’idée que se font les évêques vénézuéliens
du socialisme du XXIe siècle est loin de la réalité. Quant à la pensée sociale
du pape Jean XXIII, on peut se demander
s’ils en ont pris connaissance.
En conclusion de leur intervention, les évêques ordonnent de
ne pas respecter cette décision constitutionnelle du président Maduro et
terminent en présentant, hypocritement, le gouvernement comme source de la
violence
que vit le pays.
Nous rejetons la
convocation à cette Assemblée constituante, et nous exhortons la population en
générale à ne pas se résigner, à élever sa voix de protestation, sans tomber
toutefois dans le jeu ce ceux qui génèrent cette violence dans le but de
conduire le pays dans un scénario de plus grandes confrontations en vue
d’aggraver la situation et de garder le pouvoir. » Pt. 7
UNE POSITION QUI VA COMPLÈTEMENT À L'ENCONTRE DE L'INTERVENTION DU PAPE FRANÇOIS QUI LEUR DEMANDE DE SERVIR DE PONT ENTRE LE GOUVERNEMENT ET L'OPPOSITION.
À vous d’en juger !
Oscar Fortin
Le 7 mai, 2017
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