jeudi 10 novembre 2011

L’ÉTAT AUTANT QUE NÉCESSAIRE, LE PRIVÉ AUTANT QUE POSSIBLE


MAIS JAMAIS LE CONTRAIRE



Pendant que dans les pays du nord le refrain des hommes politiques et des oligarchies économiques et financières  clame haut et fort le démantèlement de l’État au profit du « privé »,  dans les pays émergents, le refrain est plutôt de renforcer l’État de manière à lui permettre d’harmoniser toutes les forces productives et toutes les richesses du pays au service prioritaire  du « bien commun » de l’ensemble de la société.  Pour ces derniers l’État est pour la société ce qu’est l’autorité parentale pour la famille. Le patrimoine national doit être géré pour le bien de tous et toutes.

LES POUVOIRS DE L’ÉTAT SOUS CONTRÔLE OLIGARCHIQUE

Nous réalisons de plus en plus que derrière les démocraties que nous ventons et dont nous nous faisons les promoteurs à travers le monde se profilent des intérêts privés dont la pleine sécurité repose sur le contrôle des divers pouvoirs dont dispose l’État. Leur main mise sur les pouvoirs politiques, législatifs et judiciaires leur permet de les orienter de manière à ce qu’ils répondent prioritairement à leurs intérêts.  Peu leur importe les incidences négatives que ces intérêts peuvent avoir sur le bien commun de l’ensemble de la société. Comme ils disent, elles ne sont pas là pour faire la charité ou s’occuper du mieux être des populations. Elles sont là pour elles-mêmes et leurs alliés.

L’histoire de nos démocraties à l’occidentale démontre avec toujours plus de clarté cette prise de contrôle de l’État par des oligarchies, toute dévouées aux intérêts privés de leurs membres. Elles seront là pour financer les partis politiques, pour diriger le choix des candidats acceptables et leur apporter tout le soutien médiatique indispensable à la conquête des diverses fonctions de l’État.

Elles seront également là pour orienter les législations et la fiscalité de manière à leur assurer l’accès aux richesses du pays et à leur exploitation aux moindres coûts. Elles pourront bénéficier de généreuses subventions et de multiples services d’infrastructure que l’État assumera à même les impôts de ses contribuables.

Tout cela est évidemment présenté sous des dehors où les principaux bénéficiaires deviennent de véritables bienfaiteurs, assurant du travail à des centaines de travailleurs et permettant le développement économique et industriel des régions et du pays tout entier.

Le discours officiel ne dira jamais, par contre, que l’État met à la disposition des entreprises l’énergie productive des travailleurs, principaux créateurs de la richesse ainsi qu’un nombre incalculable de bénéfices en subventions, en fiscalité et en infrastructures.

Lorsqu’arrive les temps de crise, comme ceux que nous vivons actuellement, ces mêmes oligarchies, accrochées aux multiples subsides de l’État et bénéficiaires des lois fiscales les plus généreuses à leur endroit se font les apôtres du démantèlement de l’État social au profit de l’État entièrement privatisé.

LES POUVOIRS DE L’ÉTAT SOUS CONTRÔLE POPULAIRE

Dans les pays émergents de l’Amérique latine le balancier du contrôle des pouvoirs de l’État passe du pouvoir des oligarchies à celui des peuples. Ces derniers se réapproprient la démocratie dans son sens le plus vrai « le pouvoir du peuple par et pour le peuple ». Ils passent de la « démocratie représentative » à la « démocratie participative ». Dans les faits ça veut dire que dans le premier cas, une fois les élections terminées, comme c’est le cas dans nos pays,  les élus (es) font à peu près ce qu’ils veulent, d’où la grande latitude de oligarchies pour y régner en maitres. Dans le second cas, des dispositifs constitutionnels et du fait même contraignants, permettent au peuple d’intervenir à tout moment. Il peut le faire soit à travers ses associations, ses regroupements et ses syndicats pour corriger le tir de ses dirigeants, soit directement par référendum, pour les destituer. Il n’y a pas de chèque signé en blanc remis aux élus. Ils doivent rendre des comptes et assumer des décisions en conformité avec la volonté de leur peuple.

Ce renversement des pouvoirs ne se fait pas sans que les anciens maitres des pouvoirs de l’État fassent des pieds et des mains pour qu’il n’en soit pas ainsi. Tout sera utilisé pour empêcher ces nouveaux venus, que sont finalement les peuples, de reprendre le contrôle de leur État. Leurs dirigeants seront diabolisés, diffamés et même assassinés. Dès que des correctifs seront apportés à des législations qui avaient pour finalité de protéger leurs privilèges, ils crieront à l’atteinte aux libertés fondamentales et mettront à contribution leurs propres commissions des droits de la personne pour élaborer des dossiers fondés sur des demi-vérités si ce n’est sur des mensonges inventés de toute pièce. Dans la majorité des cas, les oligarchies nationales et internationales provoqueront des tentatives de coups d’État militaires. La voie démocratique, prêchée avec tellement de conviction lorsqu’ils en contrôlaient tous les rouages, ne les sert plus là où les peuples ont compris leur mascarade. Ce fut le cas au Venezuela en 2002, en Bolivie, en 2008, au Honduras, en 2009, en Équateur, en 2010. Le seul à avoir réussi est celui du Honduras. Dans les autres cas, la vigilance du peuple a fait échouer ces opérations terroristes menées avec le soutien de Washington.

QUEL EST DONC LE PÉCHÉ DE CES GOUVERNEMENTS

Dans tous les cas il s’agit de gouvernements démocratiquement élus avec un fort appui populaire. Leurs dirigeants ont fait allégeance au principe selon lequel l’État est le responsable du Bien commun et qu’il lui revient de prendre tous les moyens mis à sa disposition  pour atteindre cet objectif. Pour faire court, ces objectifs du bien commun portent sur les éléments de base permettant d’assurer la santé, l’éducation, l’alimentation, le logement, la sécurité et le développement de l’ensemble de la société. Il est le garant de la gestion des richesses du pays et de la mise en place des ressources nécessaires à la réalisation de ce mandat.  Sa clientèle prioritaire est et demeure le peuple dans toutes ses composantes.

Il est évident que le passage d’un « bar ouvert » où les multinationales et les oligarchies puisaient à volonté dans les richesses du pays sans y laisser la rente correspondante aux valeurs de ces  dernières, à un « bar contrôlé » par  l’État qui ne leur permet plus de faire ce qu’ils veulent, n’est pas de nature à leur plaire beaucoup. Ces oligarchies accuseront ces gouvernements de communistes, de marxistes, de dictatoriaux pour le seul fait d’être mis au pas de la justice sociale et des impératifs du Bien commun de la société.

L’État qui prend au sérieux son mandat de gérer en bonne autorité parentale le bien commun de toute la famille devient suspect dès qu’il fait passer au second plan les intérêts des oligarchies nationales et internationales. Ces dernières préfèreraient que ce soit plutôt « le privé autant que nécessaire et l’État autant que possible ».  Elles devront toutefois se résigner au fait que « le moi, premier servi » des oligarchies devienne le « moi premier servi » du peuple.

Le mouvement des indignés à travers le monde ne fait que relever cette grande tricherie dont sont victimes les peuples. Le seul fait d’en prendre conscience génère déjà les énergies pour en chercher l’élimination.


Oscar Fortin
Québec, le 9 novembre 2011
http://humanisme.blogspot.com




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