mardi 29 janvier 2013

LE GRAND MIRAGE DU NÉOLIBÉRALISME





Nombreux sont les pays qui s’identifient au néolibéralisme et qui en font une option fondamentale de liberté et de développement. Les deux colonnes sur lesquelles il repose sont, pour l’essentiel, la démocratie et la libre entreprise. En leurs noms, de nombreux gouvernements ont été renversés. Parfois, c’était en invoquant le caractère anti-démocratique et dictatorial de certains gouvernants, mêmes élus par leur peuple, tantôt c’était des contraintes inacceptables, imposées à la libre entreprise.

Alors qu’en est-il vraiment de ces deux colonnes ?

D’abord, parlons de la démocratie, de cette démocratie dont nos ténors politiques sont si fiers. Qu’a-t-elle de vraiment démocratique ? Quelle est la place qu’elle accorde au peuple dans l’exercice des pouvoirs de l’État ? De fait, comment parler de démocratie sans parler de ce pouvoir du peuple pour le peuple ?

Pour nous en tenir qu’au Canada, sachant que sa réalité démocratique se retrouve dans à peu près tous les pays de même inspiration, le premier ministre Harper a l’entière maîtrise des pouvoirs de l’État canadien avec 25 % de son électorat et avec moins de 40 % de ceux et celles qui sont allés aux urnes pour voter. C’est dire que 75 % de l’électorat canadien, donc une grosse majorité, peut ne pas se reconnaître dans l’exercice actuel du pouvoir de l’État. Il en va de même pour les 61 % de ceux et celles qui  votèrent contre le parti politique de M. Harper.

Les 39 %, ayant voté pour les candidats de son parti, lui assurent les pleins pouvoirs politique d’un gouvernement majoritaire, sans, pour autant, faut-il le noter, avoir eux-mêmes une emprise sur ce pouvoir. Il est vrai que leurs élus les représentent, mais ce sera en suivant la ligne du parti lequel suivra la ligne du premier ministre et de son exécutif, lesquels suivront la ligne de leurs mentors oligarchiques ainsi que celle de leur puissant voisin, les États-Unis. Le peuple viendra en tout dernier lieu.

Entre le pouvoir du peuple et celui de l’État, il y a toute une mécanique qui fait en sorte que le peuple garde l’illusion d’une participation démocratique à son devenir politique, économique, social et culturel. Dans les faits, les principaux partis politiques sont des outils de première main, permettant à certains groupes puissants d’en contrôler la constitution, les orientations et tout particulièrement les leaders. Pour ce faire, il y a l’argent, les médias, la corruption et tout ce qui va avec.

Là où les résultats anticipés ne font pas problème, la mécanique électorale fonctionne normalement. Là où de sérieux problèmes peuvent se présenter, des mécanismes plus sophistiqués d’intervention sont mis en place. Le cas des dernières élections présidentielles au Mexique en est une bonne illustration. Beaucoup d’autres exemples pourraient illustrer ce type d’interventionnisme.
  
Que dire maintenant de la libre entreprise ?

De plus en plus d’exemples démontrent que la collusion entre les grands conglomérats annule les effets bénéfiques de la compétitivité. On nous laisse l’illusion d’une certaine compétitivité par de multiples procédés dont le marketing des spéciaux de fin de semaine ou, comme pour l’essence, d’une variation des prix d’une région à une autre. Dans ce dernier cas on s’assurera que les régions soient  suffisamment éloignées les unes des autres pour ne pas attirer les consommateurs de l’autre région. 

Ce sont là des mesures à la périphérie du système, n’ayant pour but que de laisser l’illusion du grand bienfait de la liberté d’entreprise. Ce qui faisait l’orgueil du capitalisme originel, l’offre et la demande, est devenu une mise en scène qui ne garde de la réalité que les apparats.

Que nous révèle la Commission Charbonneau ?


Elle nous démontre que les partis politiques, dans leur ensemble, sont des noyautages qui permettent aux intervenants privés de s’attacher les futurs élus aux fins de leurs propres intérêts. Ce sont ces partis, avec leurs élus grassement financés, qui auront à livrer la marchandise attendue.

Nous sommes loin du pouvoir du peuple pour le peuple. C’est plutôt le pouvoir des oligarchies pour les oligarchies.

Ce n’est pas pour rien que tout le système étatique est bâti sur une constitution, écrite par ces oligarchies, et à propos de laquelle le peuple n’a eu rien à dire. Ça s’appelle la démocratie représentative,  sans toutefois préciser de qui elle est représentative.

La Commission Charbonneau nous révèle que le principe de l’offre et de la demande, a été complètement contourné par la collusion des principaux intéressés. À ce chapitre le Québec ne fait pas exception et aucun État n’y échappe.

Conclusion

Si encore le néolibéralisme se révélait sur la base de ses principes de liberté, de générosité et de saine compétition, nous pourrions en mesurer l’efficacité et ses bienfaits, mais tel n’est pas le cas.

Avec l’éveil des peuples, nous comprenons mieux maintenant pourquoi ces oligarchies veulent réduire l’État, cet outil unique dont dispose les peuples pour œuvrer au bien commun de l’ensemble de la collectivité. Elles savent que les intérêts des peuples ne sauraient se subordonner à leurs intérêts corporatifs et qu’elles devront subordonner leurs propres intérêts aux impératifs du bien commun de la collectivité.

La liberté des uns n’a-t-elle pas pour frontière les droits des autres. Dans le cas présent, le droit des autres, c’est celui du peuple. D’ailleurs ce principe devrait s’imposer à tous les acteurs d’une société.

Il est urgent de lever le voile sur ce grand mirage du néolibéralisme qui n’a rien de néo (généreux) ni de libéralisme (liberté).

Certains peuples ont décidé de reprendre en main et leur démocratie et leur libéralisme économique. Leur premier geste, en arrivant au pouvoir, a été d’écrire une constitution qui soit à leur image et qui corresponde à leurs intérêts.

Le peuple québécois a des choix à faire et il les fera lorsqu’il en aura pleinement conscience. À nous d’y travailler. Un leader sans peuple est sans ressource et un peuple sans leader est sans guide.

Oscar Fortin
Québec, le 29 janvier 2013















vendredi 25 janvier 2013

LE VATICAN ET L'ARGENT





« Lc 12 33 Vendez vos biens et donnez l'argent aux pauvres. Munissez-vous de bourses qui ne s'usent pas, amassez-vous des richesses dans les cieux, où elles ne disparaîtront jamais : les voleurs ne peuvent pas les y atteindre ni les vers les détruire»

Voilà bien le message donné par celui sans lequel n’existerait aucune église chrétienne. Toutes se réclament de ce Jésus de Nazareth, auteur, selon l’évangéliste Luc, de cette consigne relative à la richesse. Un rappel incontestable que le royaume qu’il inaugure ne saurait reposer sur les richesses temporelles, mais sur celles qui naissent de l’intériorité et ouvrent sur des richesses de solidarité, de fraternité, d’amour, transcendant ainsi les dimensions matérielles.

Parler du Vatican, c’est parler d’un État et du Pape qui en est le chef. C’est parler également des cardinaux qui y résident et des nonciatures apostoliques qui en assurent la représentation dans les pays du monde. Il est le centre mondial de la foi catholique qui définit la doctrine et la morale. Plus que tout, son chef, le Pape, se présente comme le représentant direct de ce Jésus de Nazareth sur terre. Son autorité est identifiée, non pas à celle de Pierre dont il est le successeur, mais à celle de Jésus. D’ailleurs, la représentation artistique de ce Jésus ressuscité est placée juste à l’arrière du Pape lorsqu’il donne sa bénédiction aux pèlerins. Il ne s’agit pas d’une peinture de l’apôtre Pierre, mais de celui qui en est le maître.

Ce n’est pas d’aujourd’hui que le Vatican est associé à l’argent, non pas pour en écarter le monde, comme le suggèrent les Évangiles, mais pour en être un artisan important. Nous connaissons tous les scandales qui ont entouré et entourent toujours la banque du Vatican.

Le dernier en liste est celui de l’achat de biens immobiliers, sous le couvert de prête-noms, avec l’argent obtenu de Mussolini en échange de la reconnaissance papale du régime fasciste.

« Le Vatican a acheté des biens immobiliers au Royaume-Uni, en France et en Suisse grâce à l'argent du régime de Mussolini, écrit mardi le journal britannique Guardian
Ainsi, selon le quotidien, le Saint-Siège possède, via un réseau de sociétés fictives, des immeubles de bureaux sur la place Saint-James à Londres, acquis en 2006 pour un montant total de 15 millions de livres, soit 23,8 millions de dollars. Ces sites sont gérés par la société suisse Profima SA détenue par le Vatican, soupçonnée dans les années 1940 d'avoir été impliquée "dans des opérations contraires aux intérêts des Alliés"
D'après les informations obtenues par le Guardian, les biens en question ont été achetés par le Vatican avec l'argent reçu de Mussolini en échange de la reconnaissance papale du régime fasciste italien en 1929. Selon le journal, les investissements des fonds versés par les fascistes ont rapporté près de 800 millions de dollars au Saint-Siège à ce jour. » 
LÀ OÙ EST LE SCANDALE

S’il ne s’agissait pas d’une institution qui a comme charte fondamentale les Évangiles et comme fondement la personne du Nazaréen, l’évènement, en lui-même, n’aurait pas de quoi scandaliser. Le monde des investisseurs et celui des spéculateurs le font quotidiennement sans que nous en fassions un scandale.

Dans le cas présent, l’opération est soutenue par ceux-là mêmes qui ont pour mission de mettre en garde le monde contre l’emprise des richesses matérielles et de rappeler l’importance de la foi au Père  qui saura, en son temps, répondre aux besoins quotidiens de chacun.

« Voilà pourquoi je vous dis : Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous le vêtirez. Car la vie est plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement Aussi bien, cherchez son Royaume, et cela vous sera donné par surcroît. » Luc 12, 22-23-31)

Il est difficile de concevoir comment ceux qui habitent et dirigent le Vatican peuvent se regarder dans le miroir de l’Évangile et y reconnaître les authentiques disciples et messagers de Jésus de Nazareth.  Comment peuvent-ils avoir quelque crédibilité que ce soit lorsquils sadressent aux pauvres et aux humbles de la terre ? Comment peuvent-ils prêcher le détachement des biens matériels et la vanité des apparats lorsquils en sont revêtus ?

Un vieil évêque catalan (84 ans), Pere Casaldàliga, passa sa vie au Brésil avec les pauvres, partageant leur mode de vie, leur quotidien et leurs luttes pour la justice et le bien-vivre. Considéré comme l’évêque de la théologie de libération, il fut appelé à Rome à quelques reprises pour y être scruté par les responsables de la doctrine de la foi, dont Joseph Ratzinger, alors préfet de cette doctrine. Il raconte qu’à un moment donné il invita ces savants personnages qui le questionnaient à réciter avec lui un Notre Père pour la conversion de l’Église. Selon ses propos, Ratzinger lui aurait répondu par un sourire ajoutant sous forme interrogative « pour la conversion de l’Église ? »  



Toujours est-il que sa plus récente déclaration est que la réforme de l’Église doit commencer par la suppression du Vatican comme État et que le pape devrait cesser den être le chef.

Étant moi-même croyant en ce Jésus de Nazareth, ma foi ne saurait se reconnaître dans ces personnages en qui tout sonne faux. Quelque part, il y manque le ferment de cet Évangile et la foi qui va avec. Si ces objectifs sont vrais pour tout croyant, ils le sont encore davantage pour ceux qui s’en font les promoteurs.

Oscar Fortin
Québec, le 25 janvier 2013
http://humanisme.blogspot.com