mardi 28 février 2012

LORSQUE LE TEMPS CÈDE LE PAS À UN AU DELÀ QUI NOUS ÉCHAPPE


TOUT RÉCEMMENT, MON BEAU-FRÈRE GILLES APPREND QU’IL EST RONGÉ PAR UN CANCER ET QU’AUCUN TRAITEMENT CURATIF N’EST POSSIBLE. DE QUOI BOULEVERSER SA VIE ET CELLE DE SA FAMILLE. CETTE SITUATION, QUI M’A PROFONDÉMENT TOUCHÉ, A FAIT NAÎTRE EN MOI UNE RÉFLEXION QUE JE LUI AI ENVOYÉE ET, QU’AVEC SON ACCORD, JE ME PERMETS DE PARTAGER AVEC VOUS.

LA GRANDE ESCALADE

Bonjour Gilles, ce matin je te vois agrippé à cette immense muraille que tu escalades avec l’énergie de tout ton corps, mais aussi avec la détermination d’atteindre ce sommet donnant sur  l’autre coté de la montagne. Suspendu entre ciel et terre, tu es seul à vivre ce dernier passage devant conduire au sommet.

Je me souviens de tes nombreux diaporamas, véritables fenêtres ouvertes sur la nature, sur les montagnes, les lacs et les rivières, mais aussi sur les enfants, les femmes et les hommes, témoins de bonté, de beauté, de courage. Comme j’ai eu l’occasion de te le dire lors de ma dernière visite, c’est ce regard qui me parle le mieux de toi, de tes émotions, de tes sentiments, de tes rêves et de tes émerveillements.

Il m’arrive parfois d’imaginer ce que me révèlera l’autre coté de la montagne, alors que j’atteindrai le sommet. Au delà de l’horizon infini, de ces nuages que je peux toucher de la main, je vois le monde de mes rêves, porteur de joie, de paix, de justice, de vérité, d’amitié, de fraternité, mais aussi de toutes ces beautés d’une nature qui ne se tarit pas. Je vois tous ces êtres aimés, tous occupés à faire ce dont ils avaient toujours rêvé. Plus rien ne les y empêche. J’y retrouve une Humanité nouvelle, complètement libérée de toutes les tares qui la rendaient si lourdes à porter.

Tout cela pour dire que ma vie, ta vie, nos vies ne sont pas condamnées à un seul coté de la montagne. Il y a cet autre coté qui ouvre sur la maison du Père, ce Père dont Jésus de Nazareth nous a parlé tellement en bien. Le Père attentif, soucieux de nos moindres besoins, plus que jamais, présent, à travers nos êtres les plus chers, en ces derniers moments d’une escalade difficile, souvent angoissante et parfois même, à la limite du tolérable.  Nous pouvons  le reconnaitre dans le regard et les gestes de nos petits enfants, de nos enfants et de tous ces êtres qui nous sont chers.

Gilles, je te sais réaliste et les deux pieds bien ancrés sur le sol. Te voilà rendu au dernier tronçon de ton escalade. Tu peux regarder vers le bas, ce sera le vertige. Tu peux regarder la muraille devant toi, ce ne sera que du noir. Tu peux aussi regarder vers le haut, ce sera alors la lumière et l’espérance.

Gilles, si tu savais comment je me sens près de toi en ce moment. Depuis quelques années ma propre escalade m’a enseigné qu’à chaque instant tout peut basculer. J’ai appris à vivre au quotidien en regardant toujours par le haut et en me nourrissant de ces belles choses qui trop souvent nous échappent. Je crois en cette humanité nouvelle et je sais que le Père est toujours là, non pas pour marcher à notre place, mais pour nous soutenir et nous encourager à maintenir le cap sur la grande destinée qui marque chacune de nos vies.

Puisse tes enfants et petits enfants trouver en toi, en ces heures difficiles, ce visage du Père porteur d’amour, de bonté, de foi et d’espérance. Tu vois, ta mission n’est pas terminée. Il te reste encore quelques roses éternelles à semer dans le cœur de tous ceux et celles qui croiseront ton chemin.

Avec toute mon amitié fraternelle

Oscar

Québec, le 23 février 2012

N.B. Ce qui arrive à Gilles et à sa famille arrive également à des milliers de personnes. Si cette correspondance apporte quelques énergies supplémentaires à certaines d'entre elles, Gilles et moi nous en serons les plus heureux.

2 commentaires:

Marius MORIN a dit...

L’éventualité de la mort est une réalité inéluctable. Elle est le grand défi de tout être humain. Elle nous apparaît parfois désespérante et absurde. Elle n’est pas toujours la bienvenue. Voici un petit texte que j’ai écrit en l’an 2000 et que je dédie à Gilles, ton beau-frère.

L’HEURE VENUE

Apprivoise la mort, puisqu’elle est inévitable,
Faisant ta confidente, une sœur, une amie.

Elle deviendra, alors, ta compagne acceptable
Et viendra te cueillir doucement et sans bruit.

Pour tous ces sursis qu’elle t’accorde,
Chante-lui une Hymne à la joie,
En savourant chaque seconde, comme pour la dernière fois.

Si parfois, elle te manifeste sa présence,
C’est pour te rappeler l’heure du grand départ.

Maintes fois, elle a reculé l’échéance
Par pure générosité à ton égard.

Puis, quand sonnera ton heure, elle viendra te rencontrer
Et te prendra par la main pour te conduire
Dans ta vraie demeure, celle de ton Union-Totale-En-Dieu,
Le Père éternel. Amen!

Marius MORIN

Oscar Fortin a dit...

Gilles a lu ton texte et m'a dit l'avoir beaucoup apprécié. Alors, en son nom, merci.