vendredi 22 avril 2005

BENOÎT XVI À L'HEURE DE LA MATURITÉ DANS LA FOI

L’arrivée de Benoît XVI comme successeur de Pierre et pasteur de l’Église m’a plutôt laissé avec un goût amer et une profonde déception. À l’exemple de nombreux chrétiens et pasteurs, je me suis recueilli pour prier dans l’espoir d’y entendre l’Esprit Saint, âme de l’Église, de même que le Ressuscité, Tête bien vivante du Corps que nous formons tous, me faire comprendre où pouvait bien nous conduire ce choix.

Un peu comme pour les cardinaux au Conclave, une lumière s’est faite en moi et une première réponse m’est venue de Benoît XVI lui-même, plus particulièrement de l’homélie qu’il prononça à l’entrée du Conclave et que nous rapportait Le Devoir du 20 avril :

Nous ne devrions pas rester des enfants dans la foi, comme des mineurs ? Que signifie ne pas rester des enfants ? Paul dans sa lettre aux Éphésiens répond à cette question : « Ainsi nous ne serons plus des enfants, ballottés, menés à la dérive, à tout vent de doctrines, joués par les hommes et leur astuce à fourvoyer dans l’erreur. Mais, confessant la vérité dans l’amour, nous grandirons à tous égards vers celui qui est la tête Christ. Et c’est de lui que le corps tout entier, coordonné et bien uni grâce à toutes les articulations qui le desservent, selon une activité répartie à la mesure de chacun, réalise sa propre croissance pour se construire lui-même dans l’amour. » Éphésiens, ch. 4, 14-16

Cette référence au texte de Saint Paul que cite Benoît XVI dans ses premiers versets mais que j’ai cité en entier pour la circonstance, nous rappelle que le Christ tête est celui qui distribue les dons et les activités selon la mesure de chacun. Il nous dit que la foi qui nous habite est celle qui nous incite à prendre nos responsabilités dans la vérité et dans l’amour selon la mesure de la grâce de Dieu en chacun de nous. Ainsi, être adulte dans la foi c’est d’abord et avant tout être attentif à cette foi, don de Dieu, que nous portons en nous et qui guide notre vie. Les doctrines et les idéologies, les convictions fondées davantage sur les astuces d’hommes plus préoccupés de pouvoir et de manipulations que du témoignage de Jésus venu d’abord et avant tout pour les pauvres, les pécheurs, les humbles, les laissés pour compte et pour toutes les personnes de bonne volonté ne doivent pas nous distraire des impératifs que la foi fait naître en chacun de nous.

J’ai alors compris, à la lumière de cet extrait de Paul, que l’arrivée de Benoît XVI allait nous obliger à prendre en main notre propre foi et à l’assumer, avec la grâce de Dieu, au meilleur de notre conscience.

La deuxième réponse m’est venue d’un courriel de Top Chrétien.com, fait inusité et quelque peu providentiel dans les circonstances. Jamais par le passé je n’avais reçu ce type de courriel:

Ephésiens 3.17-20.
« Que le Christ habite dans vos coeurs par la foi! Plongez vos racines dans l’amour et soyez solidement construits sur cet amour. Alors vous serez capables de comprendre avec tous les chrétiens la largeur, la longueur, la hauteur et la profondeur de l’amour du Christ. Vous connaîtrez cet amour qui dépasse tout ce qu’on peut connaître. Vous recevrez toute la vie de Dieu, et il habitera totalement en vous. Dieu agit en nous avec puissance. Et quand nous lui demandons quelque chose, il peut faire beaucoup plus! Oui, sa puissance dépasse tout ce qu’on peut imaginer! »

Là encore, la réponse est à l’effet que nous devons assumer notre propre foi, les décisions qu’elle nous inspire et nous fait vivre dans la sérénité et l’amour. Nous ne devons plus attendre, comme un enfant, qu’on nous dise quoi faire, quoi penser, quoi dire. L’heure de la maturité dans la foi est arrivée. Il appartient dorénavant à la conscience de chacun, habitée par le Christ et son Esprit, d’être le guide de sa vie. Il est évidemment du devoir de chacun de s’informer, de méditer les attitudes du Christ dans son milieu de vie, d’être à l’écoute de la parole de ses pasteurs, de celle de ses prophètes d’hier et d’aujourd’hui, de prendre en considération les divers enseignements de ses théologiens et docteurs, de se laisser inspirer par le témoignage de vie d’hommes et de femmes de bonne volonté. Ainsi, soucieux de toujours plus d’amour dans la vie et de vérité avec soi-même et les autres chacun prendra les décisions les mieux éclairées et les plus conformes à sa situation. Personne d’autre ne peut agir à sa place. C’est sans doute pour ces motifs que Jésus a, maintes fois, insisté pour que nous ne jugions pas, même pas la prostituée Marie Magdeleine. Il a également insisté sur le fait qu’Il se réservait le pouvoir et la responsabilité de départager, lors du jugement dernier, le bien et le mal. Il nous invite à attendre le temps de la moisson pour départager le bon grain du mauvais.

Ainsi, faut-il croire que l’Esprit Saint a choisi, non sans l’aide active d’une majorité de cardinaux, Benoît XVI comme pasteur universel de l’Église pour nous forcer à assumer nos propres responsabilités et à devenir matures dans la foi ? Comme l’écrivait Louis O’Neill dans un article publié dans le journal Le Soleil du 20 avril : « Le pape est garant de l’unité ecclésiale, mais il n’a pas pour mission d’imposer l’uniformité. L’Esprit Saint intervient à tous les échelons de la vie ecclésiale—et dans toutes les confessions chrétiennes—à la manière d’un vent dont on ne sait pas d’où il vient et où il va. »

Cette réponse, obtenue dans la prière, m’a réconcilié avec cette nomination qui est une occasion nouvelle donnée à tous les croyants de devenir adulte dans la foi. Temple de l’Esprit Saint, chacun dispose du nécessaire pour aller de l’avant dans la confiance et la liberté des enfants de Dieu. N’entrons-nous pas ainsi dans une ère nouvelle où se confirme cette prophétie de Jérémie :

« Quand arrivera le temps, je réaliserai avec mon peuple une autre alliance :Je mettrai ma Loi en son intérieur, je l’écrirai dans leurs cœurs. Je serai leur Dieu et il sera mon peuple. Ils n’auront plus à s’enseigner mutuellement se disant les uns aux autres : connaissez Yahvé. Ils me connaîtront déjà tous, du plus grand au plus petit. »

Oscar Fortin, théologien

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