Il semble que toutes les
parties aient besoin d’un peu plus de temps pour que la paix revienne vraiment.
Pour Kiev, ce sera un temps
indispensable pour refaire ses forces armées et permettre à ses maîtres étasuniens
de former ses soldats et de lui fournir les armes appropriées lui permettant de
se soumettre les Républiques autoproclamées du Donbass.
Pour Hollande et Merkel, la
trêve leur permettra de sauver la face devant l’OTAN et les États-Unis qui ont
toujours besoin d’une porte ouverte, leur permettant de poursuivre en douce
leur projet d’invasion et de contrôle. En effet, dans la feuille de route, rien
n’interdit la coopération militaire avec ces deux instances. De plus, ce pas important qui vient d'être franchi est tout à leur honneur.
Enfin, pour Poutine, il faut
croire qu’il mise sur un effondrement prochain de la grande coalition entre
l’Europe et Washington. Des signes se multiplient à l’effet que cette coalition
commence à avoir des fissures qui ne feront que de s’amplifier. La photo,
coiffant cet article, nous en dit plus de ce que nous pourrions en penser.
Porochenko, la marionnette de Washington, ne semble pas très heureux de ce qui
vient de se passer lors de la première ronde de négociation, celle qui a duré
deux heures. Enfin, je me permets de relever quelques indications plus
substantielles laissant entrevoir ce possible effondrement.
Il y a évidemment l’opinion
publique européenne qui retrouve ses esprits après avoir été chloroformée par
une désinformation relative à tout ce qui touche à la Russie et en particulier à
Poutine. Les yeux s’ouvrent, les langues se délient et les Européens se
demandent de plus en plus ce qu’ils font en Ukraine et pourquoi ils y risqueraient
une guerre pouvant entraîner la destruction de l’Europe.
S’ajoute également cette
prise de consciente, toujours plus aiguë, d’être les otages des politiques de
Washington qui en font à la fois les financiers et les miliciens de première
ligne. On y voit de plus en plus une Europe qui ne s’appartient plus, une
Europe qui va chercher ses ordres à Washington, une Europe qui s’expose à la
ligne de front pour que l’oncle Sam puisse se présenter sans grands risques
pour lui-même et réaliser ses grands projets d’extension de son Empire jusqu’aux
aux portes de la Russie.
Une Europe qui a perdu sa
fierté, son indépendance, sa capacité de décider par elle-même de ses intérêts
et de ses alliances. De plus en plus de voix respectées se font entendre pour
dire que l’Europe ne peut se détacher de la Russie et encore moins s’en faire
une ennemie. Cette dernière est essentielle pour la vitalité et le
développement de l’Europe. Ces rappels ne sont pas sans que soient soulevées
ces autres questions qui portent toutes sur les véritables objectifs de
Washington dans ses aventures en Europe. Est-ce vraiment l’Ukraine qu’il veut
ou l’Europe tout entière? Quels intérêts a-t-il vraiment et jusqu’à quel point
l’Europe est-elle partie active dans la définition des objectifs et les prises
de décision?
De plus en plus d’Européens
se remémorent ces paroles tenues par une haute responsable du Secrétariat d’État
des États-Unis lors d’une conversation
téléphonique, enregistrée à son insu, «Que l'UE aille se faire foutre». Une fois connus ces propos, il y a eu des excuses, mais ces dernières
ne changent en rien le véritable sentiment de ces hauts fonctionnaires et de
leurs patrons sur l’Europe. D’ailleurs, cette haute fonctionnaire, à ce que je
sache, est toujours en fonction.
Il est fort probable
que la patience de Poutine à l’endroit des pays européens et de façon
particulière à l’endroit de l’Allemagne et de la France trouve sa motivation
sur cette fissure qui ne pourrait tarder encore longtemps avant de céder aux
pressions des Européennes qui ne voient comment ils pourraient sacrifier leur
vie et leur sécurité pour faire plaisir à l’oncle Sam. À cet égard, les
attentions de la Russie à l’endroit de ces deux intervenants ne sont jamais
marquées par la colère ou la violence. Au contraire, on fait tout pour les
mettre en évidence, comme ce fut le cas avec la déclaration du ministre des Relations
extérieures de Russie qui a mis en évidence la contribution
exceptionnelle de ces deux pays pour assurer le succès de la rencontre de
Minsk. Déjà, les défis politiques, économiques et sociaux sont suffisamment
importants pour que l’Europe ne se laisse pas emporter par des ambitions d’un
voisin lointain qui n’a d’autres intérêts que celui de dominer le monde en se
servant de l’Europe comme d’un bouclier.
Si tel est le cas qu’anticipe
Poutine, la fin de cette grande alliance entre l’Europe et les États-Unis marquerait
l’écroulement de l’empire et avec lui celui d’un monde unipolaire qui l’aura si
bien servis. Ce serait alors l’avènement
d’une ère nouvelle caractérisée par un monde multipolaire et multicentrique. Le
droit redeviendra la propriété de la communauté internationale, des peuples et
des personnes. Le monde n’aura plus besoin de l’Oncle Sam pour lui « tordre
les bras » lorsqu’il ne fait pas ce qu’il veut qu’il fasse.
Oscar Fortin
Le 12 février 2015
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