vendredi 5 septembre 2008

LA SACRAMENTALITÉ DE LA VIE


Dans les religions chrétiennes la sacramentalité occupe une place importante. Pour résumer, Jésus de Nazareth aurait laissé des rites sacramentels par lesquels il communique ses grâces et ses bienfaits de salut. Ces derniers ont été précisés à travers les siècles pour devenir les sept sacrements qui définissent, en exclusivité, l’action salvifique du Christ dans le monde. Les autorités ecclésiales en sont évidemment les gestionnaires.

Cette approche de l’action salvifique du Christ dans le monde ne résiste plus au développement des connaissances bibliques, exégétiques, théologiques et historiques des dernières décennies. Le Jésus de Nazareth, dont la figure se rapproche de plus en plus de nous, a une action et un message qui nous orientent différemment sur la compréhension de sa présence dans le monde. C’est lui qui nous fait arriver aux plus petits, aux exclus, aux laissés pour compte en s’identifiant lui-même à ces derniers. « Ce que vous ferez aux plus petits des miens c’est à moi que vous le ferez. » C’est lui qui a encouragé ceux qui luttent pour la justice en les déclarants bienheureux dans les persécutions inévitables dont ils seront victimes. Chacune des béatitudes peut être prise en ce sens. Dans cette optique nous pourrions identifier sept actions par lesquels il agit dans le monde. Nous pourrions les appeler les sept sacrements de la Vie.

Il y a le sacrement de la JUSTICE qui reconnaît que les richesses de la terre doivent être utilisées au bénéfice de l’ensemble de l’humanité, assurant les conditions de vie décente, l’éducation, les soins de santé, la paix pour tous et qui agit à travers hommes et femmes pour qu’il en soit ainsi. Il y a le sacrement de la VÉRITÉ qui soutient et encourage ceux et celles qui lèvent les voiles sur les hypocrisies, les mensonges, les manipulations pour laisser apparaître la transparence. Il y a le sacrement de l’HUMILITÉ qui rend possible des relations humaines qui valorisent et font grandir ses semblables tout en donnant la force de reconnaître ses erreurs. Il y a le sacrement de la MISÉRICORDE qui permet de faire revivre des relations blessées en pardonnant et en ouvrant à la réconciliation. Il y a le sacrement de la SOLIDARITÉ qui rapproche les personnes les unes des autres et qui permet d’être avec les plus délaissés. Il y a le sacrement de la FOI qui permet de reconnaître les lois fondamentales de la nature, de discerner l’action du Christ au service des valeurs humaines et spirituelles de chaque personne et communauté. Il y a enfin le sacrement de l’AMOUR qui unit les humains dans une relation qui les transforme en une communauté vivante et fraternelle.

Ces sept points de références rejoignent les pôles les plus importants de l’action et du message de Jésus de Nazareth. D’ailleurs, le jugement dernier que nous rapporte Mathieu (25,31-26) met particulièrement l’accent sur cette sacramentalité de la vie. Ils rejoignent également ce que les prophètes de l’A.T. ont constamment remis à l'avant plan des pratiques rituelles de la foi religieuse de leur époque.

« Cessez d'apporter de vaines offrandes : J'ai en horreur l'encens, Les nouvelles lunes, les sabbats et les assemblées ; Je ne puis voir le crime s'associer aux solennités. Quand vous étendez vos mains, je détourne de vous mes yeux ; Quand vous multipliez les prières, je n'écoute pas : Vos mains sont pleines de sang. Apprenez à faire le bien, recherchez la justice, Protégez l'opprimé ; Faites droit à l'orphelin, Défendez la veuve. (Is.1, 13-17) »


Celui qui marche dans la justice, Et qui parle selon la droiture, Qui méprise un gain acquis par extorsion, Qui secoue les mains pour ne pas accepter un présent, Qui ferme l'oreille pour ne pas entendre des propos sanguinaires, Et qui se bande les yeux pour ne pas voir le mal. Celui-là habitera dans des lieux élevés ; Des rochers fortifiés seront sa retraite ; Du pain lui sera donné, De l'eau lui sera assurée. » (Is.33 :15-16)

Mais malheur à ceux qui ajoutent maison à maison, et qui joignent champ à champ, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'espace, et qu'ils habitent seuls au milieu du pays ! Malheur à ceux qui appellent le mal bien, et le bien mal, Qui changent les ténèbres en lumière, et la lumière en ténèbres, Qui changent l'amertume en douceur, et la douceur en amertume; Qui justifient le coupable pour un présent, Et enlèvent aux innocents leurs droits ! Malheur à ceux qui prononcent des ordonnances iniques, Et à ceux qui transcrivent des arrêts injustes, pour refuser justice aux pauvres, et ravir leur droit aux malheureux de mon peuple, pour faire des veuves leur proie, et des orphelins leur butin ! (Is.5-10)

« Rends-moi justice, ô Dieu, défends ma cause contre une nation infidèle! Délivre-moi des hommes de fraude et d’iniquité! Sois vainqueur, monte sur ton char, défends la vérité, la douceur et la justice, et que ta droite se signale par de merveilleux exploits. (Ps.43 :1;45 :4) »

« Ainsi parle l'Éternel : Pratiquez la justice et l'équité ; délivrez l'opprimé des mains de l'oppresseur ; ne maltraitez pas l'étranger, l'orphelin et la veuve ; n'usez pas de violence, et ne répandez point de sang innocent dans ce lieu.@ (Jér.22 :3)
Pour conclure, il ne fait aucun doute que l’institution ecclésiale telle qu’elle existe actuellement se doit de faire une véritable conversion pour rejoindre l’action bien vivante du Ressuscité et de son Esprit dans le monde. Ces derniers sont toujours là à la Tête de l’Église distribuant les dons selon leur volonté.

« Un seul et même Esprit opère toutes ces choses, les distribuant à chacun en particulier comme il veut. Car, comme le corps est un et a plusieurs membres, et comme tous les membres du corps, malgré leur nombre, ne forment qu'un seul corps, ainsi en est-il du Christ. Nous avons tous, en effet, été baptisés dans un seul Esprit, pour former un seul corps, soit Juifs, soit Grecs, soit esclaves, soit libres, et nous avons tous été abreuvés d'un seul Esprit. » 1 Cor.12,11)

S’il y a ceux et celles qui s’identifient toujours à l’institution ecclésiale, il y en a d’autres, sans doute encore beaucoup plus nombreux, qui témoignent par leurs engagements de cette sacramentalité dans le monde. Ils auront peut-être la surprise de leur vie lorsque le Juge suprême leur dira, « venez les bénis de mon Père, ce que vous avez fait pour la JUSTICE, la VÉRITÉ, l’HUMILITÉ, la MISÉRICORDE, la SOLIDARITÉ, la FOI dans la vie, l’AMOUR, vous l’avez fait pour moi. J’étais là avec vous et vous avec moi. »

Il est urgent que soit repensé la sacramentalité rituelle dans le cadre et au service de cette sacramentalité de la vie. Aux apôtres qui regardaient toujours vers le ciel après l’Ascension de Jésus, un ange vint leur dire d’aller en Galilée, que là il l’y trouverait. La Galilée d’aujourd’hui c’est le monde où vivent plus de 6 milliards d’humains. Il est toujours là.

Oscar Fortin
5 septembre 2008

2 commentaires:

Oscar Fortin a dit...

j'ajoute en référence avec cette réflexion sur la sacramentalité de la vie un entretien réalisé avec Fredéric Lenoir, spécialiste des religions.

http://www.radio-canada.ca/actualite/V2/secondregard/#

Oscar Fortin a dit...

J'ajoute ce lien qui relie ceta sacramentalité de la vie avec Amoris Laititia

http://iftp.org/wp-content/uploads/2018/07/Les-Sacrements-de-la-vie-et-Amoris-Laetitia.pdf