Hier,
le 1er avril 2013, Francisco a été le premier pape de l’histoire de
l’Église à se rendre jusqu’à la crypte où se trouve le tombeau de Pierre. Il
s’y est recueilli, regardant avec les yeux du cœur et de l’esprit ce pêcheur
aux traits rustiques, impulsif dans ses réactions, pas toujours inspiré dans
ses jugements, traîtres au moment de la passion de son maître, mais aussi
repentant et profondément aimant au moment de la grande conversion. Il mourra,
crucifié sur une croix, la tête en bas, ne se croyant pas digne de l’être à la
manière de Jésus.
Il
n’y a pas de doute que le pape François a revu, lors de cette visite, la scène,
non seulement celle où Pierre reconnaît en Jésus le Fils de Dieu, mais aussi, et
surtout celle où il veut retenir son maître qui a décidé d’aller à Jérusalem
pour y vivre sa passion. Une scène aux résonnances multiples pour celui qui a
vécu sous le régime militaire en Argentine.
« À dater de ce
jour, Jésus commença de montrer à ses disciples qu'il lui fallait s'en aller à Jérusalem, y
souffrir beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des
scribes, être tué et, le troisième jour, ressusciter. Pierre, le tirant à lui, se mit à le morigéner en disant : “Dieu t'en préserve, Seigneur ! Non, cela ne t'arrivera point ! ». Mais lui, se
retournant, dit à Pierre : “Passe derrière moi, Satan !
tu me fais obstacle, car tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes !” Mt. 16, 21-23
J’imagine
que bien des images de son Argentine, celle soumise à la dictature sanglante
d’une junte militaire, lui passèrent par l’esprit. Il a eu, à n’en pas douter, un
regard différent sur ces prêtres, ces croyants et non-croyants, résistant aux
pressions voulant les éloigner du danger, qui y sacrifièrent leur vie pour la
justice et leur solidarité avec les pauvres. À cette époque, comme provincial
des jésuites, il intervint à plusieurs reprises pour éloigner des prêtres et
des religieux et religieuses de la violence criminelle de cette Junte
militaire.
Sa
méditation l’a également conduit à cette trahison de Pierre qui a craint d’être
identifié à ce Jésus condamné à mort pour avoir annoncé l’avènement d’un règne
nouveau de justice, de paix, de vérité, de solidarité et de compassion. Sa peur
l’avait alors transformé en un traître. À trois reprises, il a nié connaître ce
Jésus. De quoi faire réfléchir François dont les charges d’autorité l’ont
parfois éloigné des véritables engagements exigés de ses disciples par Jésus.
Je
ne doute pas que l’émotion de François ait atteint son sommet, lorsqu’il a
entendu le maître, après sa résurrection, s’adresser à Pierre en lui demandant à trois reprises: Simon m'aimes-tu ?
“Simon, fils de
Jean, m'aimes-tu plus que ceux-ci ?” Il lui répondit : “Oui, Seigneur,
tu sais que je t'aime.” Jésus lui dit : “Pais mes
agneaux.”
: “Simon, fils de
Jean, m'aimes-tu ?” - “Oui, Seigneur, lui dit-il, tu sais que je t'aime.” Jésus lui dit : “Pais mes brebis.”
“Simon, fils de
Jean, m'aimes-tu ?” Pierre fut peiné de ce qu'il lui eût dit pour la troisième fois : “M'aimes-tu ?”, et il lui dit : “Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t'aime.” Jésus lui dit : “Pais mes brebis.” (Jn, 21, 15-17)
Se faire poser la même question à trois reprises
n’est pas sans rappeler toutes les fois où il a fait, la main sur le
cœur, des promesses qui furent par la suite trahies, non accomplies. Jésus exige cette
fois que le principal intéressé s’en remette entièrement à lui et que l’humilité se substitue à la suffisance, à l’autoritarisme et
au jugement sans appel. La grandeur de Pierre repose ne repose pas sur le pouvoir de l'autorité mais sur l’humilité et sa
disponibilité entière au service de la volonté de celui qui a su lui pardonner sa trahison et sa trop grande suffisance
en lui-même.
Cette visite au tombeau
aura été, à n’en pas douter, un moment de grande méditation et de
conversion renouvelée au service de ce Jésus de Nazareth. Sur le chemin du retour, il s’arrêta également au tombeau de
Jean XXIII pour y méditer sur l’œuvre du Concile Vatican II et sans nul doute sur son Encyclique « Paix sur terre » dont ses successeurs ont peu parlé.
À peine revenu,
il téléphona à celui qui a été le secrétaire particulier de Jean XXIII, actuellement âgé de 97 ans, Loris
Capovilla. Un appel qualifié de grande émotion. Il l’a remercié pour sa vie et
son ministère et il lui a confié qu’il le voyait avec les yeux du cœur, que chaque parole qu’il écrit est une source de
grande inspiration.
Pierre, Jean XXIII et
François réunis pour ramener l’institution ecclésiale à l’évangile et au monde, assoiffé de justice, de vérité, de solidarité, de compassion,
de paix et d’amour.
Pas de doute que nous
serons témoins dans les mois qui viennent de grandes décisions. Le pape François, renouvelé de l’intérieur, posera
les gestes qu’espèrent toutes les personnes de bonne volonté.
Oscar Fortin
Québec, le 2 avril 2013
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