LE RÉVOLUTIONNAIRE ET LE CHEF D’ÉTAT
Ce coup d’État survient trois mois avant l’échéance pour de nouvelles
élections, prévues pour juin 1952. Ce qu’on passe en général sous silence c’est
que Fidel avait été choisi pour être le candidat
officiel du Parti populaire cubain (PPC) à ces élections.
« Malgré une forte réputation d'étudiant activiste, il
réussit à se faire désigner par le PPC comme candidat aux élections de
juin 1952, élections avortées par le coup d'État de Fulgencio Batista le
10 mars 1952. »
La voie démocratique n’étant plus là pour permettre à ces jeunes
révolutionnaires de conquérir le pouvoir pour y changer ce régime corrompu et
criminel, ils empruntent alors la voie
révolutionnaire. Le combat des barbus, comme on les appelle, se manifesta pour
la première fois le 26
juillet 1953 dans une attaque contre la Caserne de la Moncada
à Santiago de Cuba. Plusieurs mourront et plusieurs autres seront fait
prisonniers, dont Raoul,
et Fidel,
condamnés à plusieurs années de détention dans la prison de los Pinos. C’est
dans ce contexte que Fidel, assumant sa propre défense, déclara qu’un jour l’Histoire l’absoudra.
Ils seront amnistiés en 1956.
Sur la seconde photo, c’est ce même Raoul, maintenant âgé de 84 ans, qui
rendit possible cette rencontre historique entre le président Santos de
Colombie et le chef des FARC-EP, forces militaires révolutionnaires de
Colombie. Il s’agit d’une guerre entre colombiens et colombiennes qui dure
depuis plus de 50 ans et ayant fait des milliers de morts, de blessés et de
prisonniers. Les conditions ayant changé, un processus de paix a été enclenché
avec la participation, entre autres de Cuba, avec Raoul, et du Venezuela, avec
Chavez. C’est, d’ailleurs à Cuba que ces négociations de paix se déroulent
depuis plus d’une année, avec comme seul objectif la fin du conflit armé et les
garanties nécessaires pour une participation sécuritaire des membres de ces
forces à la démocratie colombienne.
Parler de
la Révolution cubaine, c’est parler surtout et avant tout de Fidel Castro qui
en aura été le grand stratège charismatique et de Che Guevara, devenu avec
Fidel, une véritable légende d’une Amérique décidée à rompre ses chaînes de
l’esclavage et de la dépendance pour y retrouver son indépendance et sa
souveraineté. Tout au long de ces années
de conquêtes et de turbulences révolutionnaires, Fidel et le Che occupaient les
espaces médiatiques et alimentaient la ferveur révolutionnaire. Pendant tout ce
temps, Raoul, à l’abri de toute publicité, luttait dans les montagnes de la
Sierra Maestra. Ses exploits et son sens de l’organisation en firent, dès la
conquête, en 1959, le chef des armées. C’est à lui qu’il faut reconnaître le
mérite d’avoir formé et organisé une armée capable de répondre non seulement aux
attaques constantes et menaçantes, venant des anticastristes soutenus par
Washington, contre la sécurité de
l’État, mais aussi d’apporter son soutien aux luttes révolutionnaires en
Afrique (Angola,
Congo, Afrique du
Sud), soumis aux mêmes défis révolutionnaires. Ce ne sera qu’à partir de sa
nomination à la présidence de Cuba, en 2008, à la suite du retrait de Fidel,
pour cause de maladie, que nous découvrirons
en cet homme : l’homme
d’honneur et de paix.
C’est à
Cuba que s’est réalisée la
rencontre historique entre le pape François et le patriarche Cyrille. On se
souviendra de ces paroles du Pape François qui avait remercié Cuba d’avoir
rendu possible cette rencontre et signalé que Cuba était devenu une terre de
grande réconciliation. Des paroles qui contrastent d’avec celles qui font de
Cuba la prison d’un peuple. Il faut également
attribuer à ce chef d’État cette ouverture à des négociations avec les États-Unis,
ceux-là mêmes qui maintiennent depuis plus de 55 ans un blocus économique
criminel contre le Peuple cubain. Il l’a fait, non pas en se soumettant à un interlocuteur tout puissant, mais avec la
dignité et l’indépendance d’un chef d’État qui ne se laisse pas intimider et
berner. On se souviendra de cette rencontre avec Obama où ce dernier chercha à
l’amadouer avec la tape sur l’épaule comme s’ils étaient de grands amis. Raoul
ne l’entendait pas de même et n’hésita pas un instant à lui retenir le bras
tout en lui disant que cela ne fonctionnait pas avec lui. Son geste n’est pas
celui de quelqu’un qui fait la promotion d’Obama, mais plutôt de quelqu’un qui
ne se prête pas à ce jeu d’hypocrisie auquel se prête une certaine diplomatie.
À 85 ans,
cet homme aux multiples combats dirige avec dignité et sérénité un pays qui fut la cible, depuis les tout
débuts, d’un Empire décidé à ne pas permettre qu’un petit pays comme Cuba
l’oblige à se retirer de ses terres et à le respecter dans ses choix. Les
campagnes de dénigrement et de diabolisation, les tentatives d’invasion et les
actions criminelles de saccage dans les domaines de l’agriculture et du
tourisme, les 638
tentatives d’assassinat de Fidel et
quoi d’autre encore n’ont pas réussi à détenir la marche de ce peuple.
L’éducation, la santé, la solidarité internationale en font un peuple de
référence.
Tous nos pays y gagneraient à avoir des chefs d’État qui ne sont pas à
la recherche de fortunes usurpées à leur peuple ou de soumission et
complaisance avec les puissances de ce monde, mais à la recherche de ce qui
donne à un peuple, conscience, éducation, santé et dignité. Fidel qui avoisine
les 90 ans vit une retraite, des plus sobres, en partageant avec les nombreux
chefs d’État étrangers qui souhaitent le rencontrer. Raoul, avec ses 85 ans
accomplis, prépare la relève de manière à ce que le chemin parcouru ne sombre
pas dans l’oubli et ne se transforme pas en une foire soumise aux plus
offrants.
Bon 85e anniversaire à cet homme d’honneur, Raoul Castro
Oscar Fortin
Le 3 juin 2016
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