Dans la tradition chrétienne, le carême, rappelle ce temps de la traversée du désert du peuple hébreux ainsi que les quarante jours que passa Jésus au désert après son baptême. Dans le premier cas, la marche conduisait à une « terre promise ». Dans le second, cas elle conduisait aux trois grandes tentations qui guettent l’humanité dans sa marche vers cette terre promise: l’avoir comme idole, le paraître comme force de dissimulation et de tromperie, le pouvoir comme puissance de domination absolue. Il ne saurait y avoir de terre promise sans se soustraire à la prédominance de ces trois forces destructrices d’humanité.
En tant que croyant, mais aussi et surtout en tant qu’humain, je vis cette traversé du désert en regardant le monde dans lequel je suis. Les pays les plus développés, en termes de richesse et de puissance militaire, s’unissent dans une coalition pour lutter contre un peuple de moins de six millions d’habitants. Ils disent que c’est pour sauver des vies civiles. Pourtant bien des vies civiles sont menacées en Palestine, au Yémen, en Bahreïn ainsi que dans de nombreuses régions du monde et là pas de coalition pour aller protéger ces vies humaines.
Cette semaine, le réseau français de Radio-Canada a présenté deux reportages sur les effets collatéraux, en Irak, des bombardements porteurs d’uranium enrichi. Nous pouvions y voir des images d’enfants nés complètement déformés, des visages avec seulement un œil, des corps avec deux têtes etc. Pourtant cette guerre annoncée à grand renfort par les médias occidentaux se voulait une lutte contre des armes de destruction massive qu’on jurait être en la possession de Saddam Hussein. L’histoire nous a révélé qu’il n'en était rien et, qui plus est, que le mensonge avait été monté de toute pièce. Que n’a-t-on pas dit au sujet de Saddam Hussein! Suffisamment pour que les gens ordinaires qui s’alimentent aux médias dominants aient le goût de le tuer pour libérer son peuple d’un tel monstre. Qui, en effet, peut demeurer insensible à ces images où coule le sang et où les mères pleurent leurs enfants? Pourtant que de fois ces nouvelles aux images sensationnelles ont été montées de toute pièce.
Dans cette marche du désert, je découvre que ces trois tentations, plus haut mentionnées, trouvent preneurs et pas à peu près. D’abord la conquête des richesses, de toutes les richesses que les peuples peuvent avoir dans leur sous-sol où sur leurs terres aiguise l'appétit des puissants. Ce sera le pétrole pour les uns, les mines pour les autres, le contrôle de l’eau pour les uns et les autres. L’avoir, devenu « intérêt national », justifiera la corruption, la violence, la tricherie, les tortures sous toutes les formes.
De même, sous le manteau du bien paraître humain, du protecteur de la veuve, de l’orphelin, du défenseur des vies civiles, comme ils dissent, ce sont des guerres de conquêtes, de dominatioin. qui nous révèlent l’hypocrisie à son meilleur. Autant le message, préparé par les spécialistes de la désinformation, alimente la haine dans l’esprit et le cœur du bon peuple contre des adversaires, devenus, sous leur plume, de véritables monstres à faire disparaître de la surface de la terre, autant ce même message en arrive à transformer tout à la fois les initiatives guerrières en véritables croisades au service de l’humanité et les assassins de ces adversaires en de véritables missionnaires.
Tout cela n'est possible qu’en prenant entièrement contrôle de toutes les forces politiques, économiques et en devenant l’ « empire du monde ». C’est bien là la troisième grande tentation qui guette l’avenir de l’humanité : la domination totale des peuples et des nations par des minorités bien nanties et bien protégées.
Prisonniers d’autant de mensonges et de secrets, vous, moi et tous les autres de bonne volonté devenons des complices de tous ces crimes, de toutes ces tromperies, de toutes ces conquêtes brimant les droits les plus fondamentaux des peuples. Il y a évidemment des brèches qui commencent à ébranler le château fort de ces conquérants, passés maîtres de la manipulation et de la tricherie.
Wikileaks en est un bon exemple et ce n’est pas pour rien que ceux et celles qui sont visés cherchent par tous les moyens à faire taire son auteur et à discréditer l’organisation. S’ajoutent également tous ces sites internet qui se donnent pour mission de décoder la désinformation qui est transmise par ces maîtres chanteurs pour en donner une version plus près de la réalité et par le fait même de la vérité. Ce vaste mouvement de l’information alternative fait mal aux journalistes complices et aux médias subordonnés « aux intérêts nationaux » de l’empire.
Tout récemment certaines organisations internationales et intervenants de divers milieux, déterminés à livrer un combat à finir avec la désinformation systématique dès qu’il s’agit de justifier une guerre brimant le droit international et les droits humains, ont décidé de créer un mouvement qui se ferait le chien de garde de l’information transmise. En somme, ce que Greenpeace est pour l’environnement, cette nouvelle organisation le serait pour l’information vraie.
Cette initiative trouve d’autant plus son sens que l’Organisation des Nations Unies a décrété, en décembre 2010, que le 24 mars serait consacré Journée international pour le droit à la vérité. L’inspiration première de cette initiative vient du témoignage de cet évêque du Salvador, assassiné le 24 mars 1980, pour avoir persisté, contre vent et marée, à dénoncer les crimes commis par ces gouvernements hypocrites, imposant leurs lois par la force des armes, tuant, torturant, emprisonnant à volonté d’innocentes victimes. Selon certaines sources, des journalistes, écœurés des orientations qui leur sont imposées par des patrons serviles aux orientations éditoriales des propriétaires qui les obligent à déformer la vérité, se sont manifestés pour dire qu’ils y collaboreraient dans l’anonymat.
Un réveil de conscience qui peut devenir contagieux à tous les milieux, rendant l’action des pouvoirs inefficaces devant autant de détermination. Serait-ce là la nouvelle terre promise : des gens dont la conscience n’a d’autres prix que celui de la vérité, de la transparence et de l’honnêteté?
Oscar Fortin
Québec, le 30 mars 2011
http://humanisme.blogspot.com