Qui aurait pu
penser que le Secrétaire d’État aux affaires extérieures des États unis, John
Kerry, le maître d’œuvre de l’interventionnisme de l’Occident en Syrie puisse craindre la disparition
pure et simple de l’État syrien ? Comment peut-il exprimer cette crainte
alors que depuis 2011 tout est fait pour détruire cet État ? À moins qu’il y
ait eu un lapsus dans sa déclaration et que sa crainte porterait plutôt sur la
disparition de l’État islamique (EI et DAECK) .
Vladimir
Poutine, devant l’Assemblée fédérale de Russie, en décembre dernier, avait eu
ces paroles « nous les connaissons et savons ce qu’il faut faire ». Il ne se
faisait, à ce moment-là, aucune illusion sur les soi-disant partenaires
occidentaux.
« Nous
savons qui a décidé de renverser les régimes indésirables et d’imposer
brutalement leurs propres lois. Où est-ce que cela les a menés? Ils ont semé le
trouble, détruit les institutions étatiques des pays, monté les composantes du
peuple les unes contre les autres puis s’en sont “lavées les mains”, comme on
dit en Russie, ouvrant ainsi la voie à des militants armés radicaux,
extrémistes et terroristes. »
Je
pense que M. Kerry devrait relire ce passage de l’intervention de M. Poutine
et prendre le temps de se regarder dans le miroir. S’il pense impressionner le
Président de Russie par ce genre de déclaration, il se trompe éperdument. Les
stratagèmes visant à gagner du temps pour refaire les forces des troupes en
déroutes ne collent pas avec la Russie de Poutine et de Lavrov. Pour que des négociations
de paix portent, il faut que les objectifs demeurent les mêmes et que les
moyens utilisés, pour les atteindre, soient clairement définis et sans
ambiguïté. Poutine a vu en Ukraine que les négociations de Minsk étaient
réclamées chaque fois que les troupes du gouvernement de Kiev tiraient de
l’arrière face aux combattants du Donbass, question de gagner du temps pour
refaire le plein. Ce même scénario ne peut pas se répéter avec la Syrie.
Tous
ceux qui veulent la paix en Syrie doivent reconnaître le gouvernement légitime
de Bachar El Assad et s’unir avec ce dernier pour combattre tous les
terroristes qui veulent éliminer par les armes ce gouvernement et prendre le
contrôle de l’État. Toute négociation de Genève qui ne partirait pas de cette
base sera vouée à l’échec.
Le
temps des doubles standards est révolu. La bonne foi doit s’imposer dans la
reconnaissance des droits fondamentaux des personnes et des peuples. Il ne peut
pas y avoir des peuples, des États, des personnes qui s’élèvent au-dessus de
ces droits fondamentaux tout en l’exigeant des autres.
Depuis
cinq mois, à la demande du gouvernement syrien, la Russie combat les
terroristes qui s’en prennent aux populations et aux institutions de l’État par
les armes. Elle a pu constater qui sont ceux derrière ces terroristes, ceux qui
en deviennent des complices en leur fournissant des armes, en leur donnant de
l’argent, en leur procurant des informations de nature à orienter leurs
attaques. Voici ce que disait Vladimir Poutine, en octobre 2015, au Club de
discussion internationale de Valdaï :
« Les États-Unis possèdent un grand
potentiel militaire, mais il est toujours difficile de mener un double
jeu : lutter contre les terroristes et en même temps en utiliser certains
pour poser des pions sur le damier du Moyen-Orient dans leur propre intérêt. Il
est impossible de vaincre le terrorisme si l’on utilise une partie des
terroristes comme un bélier pour renverser des régimes que l’on n’aime pas. On
ne peut pas ensuite se débarrasser de ces terroristes. C’est une illusion de
croire qu’on pourra les chasser du pouvoir. »
Force est de constater que cette attitude des États-Unis
et de leurs principaux alliés n’a pas changé, même lorsque présentée sous des
dehors tout différents. Leurs objectifs géopolitiques demeurent les mêmes et
leur soutien au terrorisme qui les sert si bien se poursuit. La Turquie,
l’Arabie Saoudite et le Qatar, particulièrement proches des terroristes,
peuvent compter sur la couverture de Washington quant à leurs interventions
directes et indirectes en Syrie. Ils savent agiter la menace et multiplier
les provocations.
Poutine a déjà dit que les responsables d’État devaient être patients
et responsables, qu’un rien pouvait enflammer la planète. Il a également dit qu’il
n’agirait sous le coup de la colère en réponse à de la provocation. Son agenda est à l’abri de tous ces
pièges qui lui sont tendus pour l'entrainer dans une guerre dont ses adversaires auraient le contrôle. Inutile, ce ne sera
que lorsqu’il sera lui-même convaincu que la paix ne peut être possible par la
négociation, qu’il décidera du moment de passer à l’attaque.
Oscar
Fortin
Le
21 février 2016
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