Plus personne ne doute que nous vivons dans
une période de grande turbulence, mais aussi de grande confusion. Pour certains,
les mots ne sont que des accessoires facilement utilisables pour entraîner les
esprits et les consciences dans le sens voulu par leurs auteurs. Ce qui
prédomine, ce ne sont plus des préoccupations, rattachées à la vérité et aux faits,
mais plutôt des ambitions de pouvoir géopolitique et de richesses
indispensables à leur développement. Il leur est plus facile de dominer les
peuples par la force que de les laisser eux-mêmes décider de leur destin tout
comme il leur est plus économique de conquérir leurs richesses que de les payer
leur véritable prix.
Présentement, nous assistons à une offensive
concertée de l’Occident contre la Russie et de façon particulière contre son
président Vladimir Poutine. Or, Vladimir Poutine n’est pas n’importe qui pas
plus d’ailleurs que la Russie qui n’est pas à mettre sur le même pied que tous
les autres pays auxquels cet Occident s’est attaqué. Plus que jamais, il est
important de prêter attention aux propos de ces dirigeants russes qui n’ont pas
l’habitude de parler pour parler.
Déjà, dans un article antérieur, l’occasion
m’a été donnée de relever l’exceptionnel
discours du président Vladimir Poutine, en octobre dernier, au Club
international de Valdaï. Un discours dans lequel chaque mot compte.
Aujourd’hui, il s’agit d’une intervention
majeure du numéro un des relations internationales de Russie, Sergueï Lavrov, un
homme dont la carrière et la réputation ne sont plus à faire. Ses mots sont
pesés et ses accents mesurés selon l’importance à donner à certaines situations.
Il y a une présentation excellente de cette intervention dont je vous donne ici
la référence. Il faut lire ce qui y est dit de ce diplomate de carrière,
très proche de Vladimir Poutine. Plus que tout, il faut entendre le message très important qu’il y livre. Il est à prendre
au sérieux tout comme il faut prendre au sérieux le Président de la Russie.
C’est devant le Conseil sur la politique
étrangère et de la défense de la Russie que le titulaire des relations internationales
a choisi de faire cette très importante conférence. Son intention n’est pas de
reprendre ce que le président Poutine a déjà clairement exprimé dans sa
conférence lors de la réunion du Club de Valdaï sinon de partager quelques
considérations sur les efforts de politique étrangère au jour le jour.
Au sujet de l’Ukraine
« Bien avant que le
pays ait été plongé dans la crise, il y avait dans l’air un sentiment que les
relations de la Russie avec l’Union européenne et avec l’Occident étaient sur
le point d’atteindre leur moment de vérité. Il était clair que nous ne pouvions
plus continuer à mettre en veilleuse certaines questions dans nos relations, et
qu’il fallait choisir entre un véritable partenariat ou, comme le dit le
dicton, en venir à « casser de la vaisselle ».
La Russie aurait préféré la première
option, mais, comme le dit le ministre, les partenaires occidentaux ont plutôt
choisi la seconde. « Ils ont soutenu les extrémistes, renonçant ainsi à
leurs propres principes d’un changement de régime démocratique.
« Comme disent les petits durs, ils voulaient voir la Russie
« se déballonner » (je ne puis pas trouver un meilleur mot pour cela),
nous forcer à avaler l’humiliation des Russes et de ceux dont la langue
maternelle est le russe en Ukraine. »
Ce que les partenaires
occidentaux ont oublié, selon Lavrov, ce sont les conseils d’Otto Von Bismarck :
« Dénigrer le
grand peuple russe, fort de millions d’âmes, constituerait la plus grande
erreur politique que l’on puisse faire. »
C’est ce qu’ils ont fait en
s’attaquant à la partie ukrainienne peuplée de citoyens de culture et d’origine
russe. Ce qu’on appelle la région du Donbass ou encore le sud-est de l’Ukraine.
Ces actions de Washington et de
ses partenaires occidentaux ont mis au grand jour leurs véritables de sorte que
les véritables discussions doivent dorénavant porter sur ces intentions de
changement de régime.
« Ce que la situation actuelle a de plus, c’est qu’une fois que
tout s’est mis en place, le calcul qui sous-tendait les actions de l’Occident
s’est trouvé révélé, en dépit de cette volonté que l’on proclamait haut et fort
de bâtir une communauté de sécurité, une maison commune européenne. »
Il n’y a plus d’histoires à se raconter et les faits
conduisent à repenser l’ensemble de la situation internationale et les
relations entre les partenaires de l’Occident et la Russie. Les sanctions
imposées à la Russie ne font que confirmer ces intentions de changement de
régime.
« Par
conséquent, en ce qui concerne l’approche conceptuelle de l’utilisation de
mesures coercitives, l’Occident démontre sans équivoque qu’il ne cherche pas seulement à
changer la politique russe (ce qui en soi est illusoire), mais qu’il cherche à
changer le régime; et pratiquement personne ne le
nie. »
Le ministre s’en prend à cette
prétention des États-Unis d’être prédestinés à diriger et dominer le monde.
« Si le
leadership dans ce monde peut être assuré, ce n’est pas en se persuadant
soi-même de sa propre exclusivité et d’un devoir conféré par Dieu d’être
responsable de tout le monde, mais seulement par la capacité et l’habileté à
former un consensus. Si les partenaires américains appliquaient leur pouvoir à
cet objectif, ce serait inestimable, et la Russie les y aiderait
activement. »
Il est très intéressant de
comprendre comment la Russie décode les ruses guerrières des États-Unis et de
ses alliés.
« il s’agit vraiment d’une guerre hybride, visant non
pas tant à vaincre l’ennemi militairement qu’à changer les régimes dans les
pays qui poursuivent une politique que Washington n’aime pas. Cette stratégie
recourt aux pressions financières et économiques, aux attaques par le moyen de
l’information; elle se sert d’autres intervenants sur le périmètre de l’état
visé, agissant par personnes interposées; et, bien sûr, ,elle use de pression,
par l’information et l idéologie, au travers d’organisations non
gouvernementales financées par des ressources extérieures. N’est-ce pas là un
processus hybride, et non ce que nous appelons la guerre? Il serait intéressant
de discuter du concept de la guerre hybride pour voir qui la mène vraiment, ou
s’il s’agit seulement de « petits hommes vêtus de tenues vertes ».
Cette approche, caractéristique des Révolutions
de couleur, est clairement identifiée par la Russie et déjà, le président
Poutine qu’il ne les laisserait pas prendre forme en Russie. Les agents
manipulateurs seront détectés, les mercenaires à gage seront arrêtés.
Pour les dirigeants de la Russie, les États-Unis ne sont
pas le pays destiné à décider du sort du monde. Cette histoire est finie et
mieux vaut en prendre bonne note.
« En tentant d’établir leur prééminence à un moment
où se font jour de nouveaux centres de pouvoir économique, financier et
politique, les Américains provoquent une neutralisation en accord avec la
troisième loi de Newton, et ils contribuent à l’émergence de structures, de
mécanismes et de mouvements qui cherchent des alternatives aux recettes
américaines pour résoudre les problèmes urgents. Je ne parle pas
d’anti-américanisme, encore moins de former des coalitions conçues comme des
fers de lance dirigés contre les États-Unis, mais seulement du désir naturel
d’un nombre croissant de pays de sécuriser leurs intérêts vitaux et de le faire
de la façon qu’ils pensent juste, non d’après ce qui leur est dicté
« depuis l’autre côté de l’étang ». Personne ne va jouer à des jeux antiaméricains
juste pour contrarier les États-Unis. »
En référence à une intervention récente du président Poutine,
il a rappelé l’importance de remodeler les bases d’un dialogue international
constructif et respectueux.
« Les grandes puissances doivent retourner à
la table des négociations et se mettre d’accord sur un nouveau cadre de
discussion qui prenne en compte les intérêts légitimes fondamentaux de toutes
les parties clés (je ne peux pas vous dire comment on devrait l’appeler, mais
il devrait en tout cas être fondé sur la Charte des Nations Unies); elles
devraient se mettre d’accord sur des restrictions auto-imposées raisonnables et
sur une gestion collective des risques dans un système de relations
internationales soutenues par les valeurs démocratiques. Nos partenaires occidentaux font la
promotion du respect de la primauté du droit, de la démocratie et de l’opinion
des minorités au sein des différents pays, tout en omettant de défendre les
mêmes valeurs dans les affaires internationales. Cela laisse à la Russie le
rôle de pionnier dans la promotion de la démocratie, de la justice et de la
primauté du droit international. Car un nouvel ordre mondial ne peut être que
polycentrique, et il devrait refléter la diversité des cultures et des civilisations
dans le monde d’aujourd’hui. »
Que conclure?
La Russie a une vision à moyen
et long terme et si elle n’a aucune prétention de conquête, elle a la
détermination et la capacité de défendre sa sécurité qui est indivisible. En ce
sens, elle est prête au combat.
Son ouverture et sa disposition pour
résoudre politiquement les problèmes sont entières pour autant que l’on parle
des vraies choses et que les États discutent d’égal à égal dans le respect de
chacun.
Il n’est pas question de laisser
les populations prorusses d’Ukraine se faire massacrer par l’armée sanguinaire
de Kiev. Il réclame un retour à la négociation politique entre les parties
belligérantes pour trouver une entente acceptable pour les deux parties.
On peut tirer la conclusion que
si l’Occident décide d’attaquer la Russie et ses zones de sécurité, elle saura
répondre de manière à ne laisser aucun doute à ses adversaires quant à sa
détermination à se faire respecter et quant aux moyens dont elle dispose pour y
parvenir.
Si vous souhaitez en savoir plus,
je vous recommande de suivre le
lien que je vous ai transmis au début de cet article et que je vous retransmets.
Oscar Fortin
Le 28 novembre 2014