Il y a près de 50 ans, le monde et tout particulièrement l’Église ont eu un PAPE dont les qualités en ont fait un PASTEUR aimé de tous. Surtout connu pour son initiative du Concile Vatican II, véritable fenêtre d’ouverture sur le monde, il est aussi l’auteur de quelques Encycliques dont les plus importantes sont MATER ET MAGISTRA et PACEM IN TERRIS (PAIX SUR TERRE). Cette dernière, comme pour la majorité des documents du Concile Vatican II, a vite pris la voie d’évitement, son contenu étant trop suspect aux promoteurs du libéralisme économique. Sa lecture m’a rapproché des grands objectifs que poursuit le Président du Venezuela, Hugo Chavez, en dépit des difficultés de parcours et du long apprentissage de ce qu’est le BIEN COMMUN d’une société.
HUGO CHAVEZ ET LE SOCIALISME DU XXIe SIÈCLE
Lorsqu’ Hugo Chavez prend le pouvoir en 1999, le pays est déjà depuis longtemps un riche producteur de pétrole qu’il expédie aux quatre coins du monde. Les ressources sont abondantes et les revenus ne manquent pas. Les gouvernements qui se sont succédé tout au long des trente dernières années ont été bénis par la Conférence épiscopale vénézuélienne et les églises célébraient l’amour de Dieu, la liberté des biens nantis et la compassion pour les pauvres. La paix régnait, l’argent circulait au sein des classes privilégiées et le Venezuela était une terre où il faisait bon vivre pour ceux et celles qui en avaient les moyens.
Le fossé des revenus
Une étude, menée en 2003 par l’Institut national de la statistique, établit la relation entre la valeur d’un panier de base nécessaire pour une famille de 5 personnes et le revenu de cette même famille. Cette méthode considère comme extrêmement pauvre « " toute personne qui, avec son revenu, ne parvient pas à se procurer un panier alimentaire de base (lequel équivaut en fait à la moitié du panier de base). Le tableau qui suit donne un aperçu de la distribution de la richesse et de la pauvreté. On peut réaliser que ceux qui doivent se partager 25%, 20% et un panier complet totalisent 15 millions de personnes et ceux qui peuvent se partager 4, 5 et 6 paniers totalisent 1 700 000.
À l'aide de ces données, on constate que le groupe des personnes extrêmement pauvres est très important, alors que celui des riches est extrêmement restreint.
Il apparaît que 2,9 millions de personnes ne sont pas en mesure de satisfaire un quart de leurs besoins élémentaires (= la moitié de leurs besoins alimentaires). 7,9 millions de personnes sont extrêmement pauvres et ont à peine assez à manger. À l'autre bout du spectre, les personnes qui peuvent couvrir plus de cinq fois leurs besoins de base sont à peine plus de 300 000, sur une population totale de 25 millions d'habitants (soit 1,2 %).
LA CONSTITUTION DE 1999
Sur le plan du contenu, la constitution renforce la participation de la population en stipulant également, outre la démocratie représentative, la démocratie participative. Elle s'oppose au néolibéralisme en défendant une économie mixte comprenant, entre autres, le modèle coopératif et la possibilité d'autogestion. De plus, elle met particulièrement l'accent aussi sur la mise en place d'un important volet social : soins de santé, enseignement, emploi.
Sur le plan économique, le tout nouveau président déclare en février 1999: " Notre projet ne veut pas une étatisation de l'économie, mais il n'est pas non plus néolibéral. Nous cherchons une voie moyenne, où la main invisible du marché collabore avec la main visible de l'État : autant d'État que nécessaire, autant de marché que possible. " (19 Richard Gott, Hugo Chávez and the Bolivarien Revolution, Verso, Londres, 2005, p. 175)
Pour voir en détail le PLAN BOLIVAR avec ses diverses initiatives dans le secteur économique, ses missions sociales, je réfère le lecteur à un excellent article, tout récent, publié en novembre 2007 sur le réseau internet et qui me sert de référence principale pour le présent article.
http://stopusa.be/scripts/texte.php?section=BUDB&langue=1&id=25481LE BIEN COMMUN constitue, pour Hugo Chavez, la référence principale de l’État et l’objet central de sa responsabilité par rapport à l’ensemble de la Société. L’État est là pour assurer ce BIEN COMMUN et ordonner l’ensemble des autres valeurs à ce dernier.
JEAN XXIII ET PACEM IN TERRIS 11 - Tout être humain a droit à la vie, à l'intégrité physique et aux moyens nécessaires et suffisants pour une existence décente, notamment en ce qui concerne l'alimentation, le vêtement, l'habitation, le repos, les soins médicaux, les services sociaux. Par conséquent, l'homme a droit à la sécurité en cas de maladie, d'invalidité, de veuvage, de vieillesse, de chômage et chaque fois qu'il est privé de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté (8).
Droits relatifs aux valeurs morales et culturelles
12 - Tout être humain a droit au respect de sa personne, à sa bonne réputation, à la liberté dans la recherche de la vérité, dans l'expression et la diffusion de la pensée, dans la création artistique, les exigences de l'ordre moral et du bien commun étant sauvegardées ; il a droit également à une information objective.
32 - Ainsi, il ne suffit pas de reconnaître et de respecter le droit de l'homme aux moyens d'existence ; il faut s'employer, chacun selon ses forces, à les lui procurer en suffisance.
35 - Voilà pourquoi une société n'est dûment ordonnée, bienfaisante, respectueuse de la personne humaine, que si elle se fonde sur la vérité, selon l'avertissement de saint Paul : « Rejetez donc le mensonge ; que chacun de vous dise la vérité à son prochain, car nous sommes membres les uns des autres (25). » Cela suppose que soient sincèrement reconnus les droits et les devoirs mutuels. Cette société doit, en outre, reposer sur la justice, c'est-à-dire sur le respect effectif de ces droits et sur l'accomplissement loyal de ces devoirs ; elle doit être vivifiée par l'amour, attitude d'âme qui fait éprouver à chacun comme siens les besoins d'autrui, lui fait partager ses propres biens et incite à un échange toujours plus intense dans le domaine des valeurs spirituelles. Cette société, enfin, doit se réaliser dans la liberté, c’est-à-dire de la façon qui convient à des êtres raisonnables, faits pour assurer la responsabilité de leurs actes.
56 – (…) citant Léon XIII : « On ne saurait en aucune façon permettre que l’autorité civile tourne au profit d'un seul ou d'un petit nombre, car elle a été instituée pour le bien commun de tous (40). » Mais des considérations de justice et d'équité dicteront parfois aux responsables de l'État une sollicitude particulière pour les membres les plus faibles du corps social, moins armés pour la défense de leurs droits et de leurs intérêts légitimes (41)
64 - II est donc indispensable que les pouvoirs publics se préoccupent de favoriser l'aménagement social parallèlement au progrès économique ; ainsi veilleront-ils à développer dans la mesure de la productivité nationale des services essentiels tels que le réseau routier, les moyens de transport et de communication, la distribution d'eau potable, l'habitat, l'assistance sanitaire, l'instruction, les conditions propices à la pratique religieuse, les loisirs. Ils s'appliqueront à organiser des systèmes d'assurances pour les cas d'événements malheureux et d'accroissement de charges familiales, de sorte qu'aucun être humain ne vienne à manquer des ressources indispensables pour mener une vie décente. Ils auront soin que les ouvriers en état de travailler trouvent un emploi proportionné à leurs capacités ; que chacun d'eux reçoive le salaire conforme à la justice et à l'équité ; que les travailleurs puissent se sentir responsables dans les entreprises ; qu'on puisse constituer opportunément des corps intermédiaires qui ajoutent à l'aisance et à la fécondité des rapports sociaux ; qu'à tous enfin les biens de la culture soient accessibles sous la forme et au niveau appropriés.
65 - L'intérêt commun exige que les pouvoirs publics, en ce qui concerne les droits de la personne, exercent une double action : l'une de conciliation et de protection, l'autre de valorisation, tout en veillant soigneusement à leur judicieux équilibre. D'une part, on veillera à ce que la prédominance accordée à des individus ou à certains groupes n’installe dans la nation des situations privilégiées ; par ailleurs, le souci de sauvegarder les droits de tous ne doit pas déterminer une politique qui, par une singulière contradiction, réduirait excessivement ou rendrait impossible le plein exercice de ces mêmes droits. « Une chose demeure acquise : l’action de l'État en matière économique, si loin qu'elle porte, si profondément qu'elle atteigne les ressorts de la société, ne peut supprimer la liberté d'action des individus ; elle doit au contraire la favoriser, pourvu que soient sauvegardés les droits essentiels de chaque personne humaine (48). »
QUE CONCLURE ?
Il ne fait aucun doute que les objectifs du socialisme du XXIe siècle et ceux exprimés dans PACEM IN TERRIS se recoupent. La Conférence épiscopale vénézuélienne (CEV) aurait tout intérêt à lire et relire ces pages du bon pape Jean XXIII. Plus que jamais elles prennent toute leur actualité dans cette Amérique latine en plein éveil social, politique, économique et culturel. L’inspiration qu’elles portent ne peut qu’encourager et soutenir les personnes et les gouvernements qui donnent priorité au BIEN COMMUN de la société sur tous les autres biens. Ceci ne veut pas dire que la propriété, la richesse, la libre entreprise, les multinationales, ne peuvent plus exister mais que leur existence doit être en harmonie avec la réalisation du BIEN COMMUN. L’État est là pour y veiller. Comme le dit Jean XXIII, pourvu que soient sauvegardés les droits essentiels de chaque personne humaine.
OÙ EST L'ERREUR ?
Oscar Fortin
6 décembre 2007
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