Un
peu comme tout le monde, j’ai suivi la saga du maire Tremblay dans sa lutte pour
maintenir son droit à la prière aux assemblées municipales ainsi que la
présence du crucifix comme symbole religieux dans la salle municipale. Déjà,
dans une lettre publique
que je lui adressais en 2011, je lui exprimais,
en tant que croyant, mon point de vue sur le sujet.
Depuis
lors, sa cause a été entendue par la Cour d’appel du Québec et le jugement
a été rendu public le 28 mai dernier.
Je
laisse à d’autres intervenants le soin d’analyser le jugement rendu. Je retiens
toutefois les propos tenus par le maire Tremblay lors de sa conférence de
presse, suite au jugement. En plus d’exprimer sa satisfaction pour sa victoire,
il a relevé l’importance de la tradition religieuse au Québec et de l’héritage
qu’elle a laissé dans la conscience du peuple. À l’écouter, la foi est un
produit culturel qui fait partie de nos vies.
Mon
opposition aux revendications du maire Tremblay n’a rien à voir avec le combat portant
sur la laïcité. Elle repose d’abord et avant tout sur la compréhension qu’il se
fait de la foi.
En
tant que croyant, je considère que la foi, celle qui transforme les cœurs et
conduit à la radicalité de l’engagement au service de la justice, de la vérité,
de la compassion, de la solidarité et de la bonté, ne peut être assimilée à
quelques expressions culturelles que ce soit. La foi chrétienne n’est ni un
folklore, ni un culte, mais un engagement qui prend à son compte les engagements
mêmes de Jésus de Nazareth.
Le
même jour où le jugement de la Cour d’appel a été émis, le pape François
rappelait à un groupe de fidèles que la
foi n’est pas un phénomène culturel rattaché à des cultes, à des traditions,
mais à un engagement. Je me permets de paraphraser, de l’espagnole au français,
une partie de son intervention.
« On peut suivre Jésus de diverses manières et pour
divers motifs.
“Certains suivent Jésus, comme quelque chose de culturel.
Ils se disent chrétiens parce qu’ils sont nés et ont grandi dans cette culture. Ils
ont une foi culturelle, mais sans l’exigence du véritable engagement qui
transforme les vies.
‘Certains autres suivent Jésus comme une proposition
culturelle, comme une manière de monter plus haut dans l’échelle sociale et
ecclésiale, une manière d’obtenir plus de pouvoir.
L’histoire de l’Église est pleine de ces gens, en
commençant par certains empereurs, suivis de beaucoup de gouvernants et de
nombreuses autres personnes. Il en va de même pour un certain nombre de prêtres
et d’évêques. Plusieurs pensent que suivre Jésus c’est une question de
carrière.’
Le
combat que mène le maire Tremblay porte sur une foi culturelle, soutenue par des cultes, des liturgies, des prières, des
symboles. Cette foi ne rejoint pas toujours celle qui s’enracine dans ce Jésus de
l’histoire qui a apporté de nouveaux paradigmes pour la gouvernance du monde. Loin
d’éclairer cette dernière, elle en est souvent le voile qui en dissimule la
réalité.
‘Que les plus grands se mettent au service des plus
petits et que les plus petits soient considérés comme les plus grands. Que les
artisans de paix et les persécutés pour la justice soient glorifiés et non
condamnés. Que les hypocrites et les manipulateurs soient dénoncés, etc. »
Le véritable combat du croyant
et du non-croyant c’est celui qui doit rendre notre humanité plus juste, plus
vraie, plus compatissante, plus solidaire, plus libre. Ce fut le combat de
Jésus de Nazareth et c’est également le combat de toutes les personnes de bonne
volonté. Que chacun et chacune puisent là où les y conduit leur conscience
l’inspiration et l’énergie pour mener dans la paix du cœur et de l’esprit ce
combat de tous les jours. En cela, nous témoignerons vraiment de nos véritables
intentions.
L’ennemi à abattre n’est pas
le croyant ou l’incroyant, mais le mensonge, la manipulation, la domination, le
sectarisme, le fanatisme sous toutes ses formes, l’individualisme, l’injustice,
etc..
Voilà, en quelques mots, ce
que je pense de cette saga du maire Tremblay et de son lien avec la foi authentique
qui est d’abord et avant tout un engagement de vie.
Oscar Fortin
Québec, le 30 mai 2013